Un polar détonnant à la gloire de Tom Cruise
Ami d'enfance de Brian Singer avec qui il collabora à l'écriture du scénario sur plusieurs longs métrages dont "Ennemi public" (1993) et le chef-d’œuvre "Usual suspects" (1995), Christopher Mc Quarrie nous livre un thriller passionnant avec "Jack Reacher". Après avoir collaboré au scénario de Walkyrie pour le même Singer en 2008, le réalisateur de "The way of the gun" retrouve la star Tom Cruise qui campe une ancienne tête brûlée de l'armée américaine reconvertie malgré elle en enquêteur spécial auprès d'une avocate (Rosamund Pike) dans une affaire de quintuple meurtre en public où l'une de ses connaissances est inculpée.
A première vue, rien d'exceptionnel au scénario. Sauf que l'histoire, tel un puzzle dont on découvre les pièces au fur et à mesure, se construit de manière beaucoup plus complexe qu'on ne pourrait s'y attendre. En fait, le film n'a pas grand chose de conventionnel, en témoigne la séquence de l'enquête en accélérée et sans blabla qui suit la scène du meurtre de sang froid. Mc Quarrie s'attarde sur ce qui l'intéresse. Il mêle intelligemment le sérieux à la réalisation ainsi qu'une intrigue qui se tient et surprend.
Il distille aussi des touches d'humour qui font mouche de la part d'un Tom Cruise au meilleur de sa forme malgré des 50 bougies. Son personnage est à son image. A la fois serein, ignorant la peur, charismatique tel un 007 et ingénieux au point d'exploiter le moindre indice anodin tel un brillant détective privé aux méthodes musclées du type Sherlock Holmes. A ce propos, si le "camouflage" du meurtre par le vrai coupable semble ingénieux à certains, rendons à César ce qui appartient à César en précisant que le même principe avait déjà été utilisé dans "ABC contre Poirot", un roman de la célèbre écrivaine britannique Agatha Christie.
La grande force du film réside dans le fait que le réalisateur parvient à ménager le suspense jusqu'au bout. Au point que l'on soupçonne tour à tour à peu près tous les personnages d'être dans le coup de ce que l'on sait être un complot puisque l'on nous montre que l'accusé est innocent dès le début (comme dans "La chasse").
Malgré une ultime bataille prenante et la présence très appréciable de Robert Duvall en tenancier d'un stand de tir qui a des fourmis dans les doigts à l'idée d'aider un fils de Marines, la fin est peut-être le passage le moins abouti. De même la poursuite en voiture sous le tunnel, bien qu'excellente, aurait peut-être pu être un peu plus poussée.
Un polar détonnant de 2h11 qui ménage intrigue haletante, bagarres et poursuites millimétrées sans nous donner à bouffer de l'action pour de l'action. La musique de l'ouverture du film est vraiment bien trouvée. Dommage qu'elle ne soit pas davantage exploitée ensuite (on ne l'entend quasiment plus jusqu'à la fin).
Un film taillé sur mesure à la gloire de Tom Cruise qui, à l'image de sa scène torse nu, ne s'embarrasse guère de modestie. Mais ceux qui verront un grossier défaut dans ce manque évident d'humilité ne seront sans doute pas les plus nombreux.