Je veux manger ton pancréas
7
Je veux manger ton pancréas

Long-métrage d'animation de Shin'ichirô Ushijima (2018)

Encore un de ces voyages initiatiques complètement niais ?

L’indifférence ... même si ce n’est pas le cœur de ce récit, ce mal qui frappe Haruki ce non-vivre est ici présent et exposé d’une manière si pure qui va à l’encontre de certaines oeuvres occidentales. Est-ce un mal qui touche sensiblement le Japon, un mal intérieur vicieux auquel certains n’y échappe pas (peut-être pas non plus un mal à chaque fois)? Parce que c’est pour moi le seul pays à traité ce sujet face à face dès le plus jeune âge. Comme si dans les autres pays c’était un sujet à éviter comme si dans es sociétés cette caractéristique, cet état trop inhumain pour eux faisait trop peur (je pense à l’emblématique roman sur l’indifférence L’Etranger). Et quel dommage quand on peut voir qu’il peut être si bien traité ! 

En effet, la conclusion de ce film est que l’indifférence est peut être quelque chose à combattre pour aller plus loin car certaines âmes se sont juste perdues en elle-même. (Surtout que même le Haru du début a une valeur immense).
Haruki est indifférent, la cause est décrite simplement : il n’arrive pas à accepter ou à aimer les autres. Il reste seul avec ses livres. Sakura est intriguée.
Le cadrée est petit, c’est eux, c’est leur histoire c’est pour ça qu’on ne s’y identifie pas tant que ça et ça fait du bien ! On ressent des sentiments par leurs sentiments à eux directement pas par similarité.
Les deux personnages nous touchent tellement que c’est même pour le spectateur leur histoire à tous les deux et on ose pas y toucher. Juste les deux ensembles et leurs sentiments l’un a l’autre suffit.
C’est là la force de ce récit et de cette animation. Le cadre est minimal seulement 4 personnages qu’on pourrait qualifié de principaux qu’on ne peut même pas vraiment définir. Un gars qui propose tout le temps des chewing-gums avec un air sympa (on aurait pu vouloir l’éviter au début comme le personnage principal avec son apparence de mec à l’aise mais non il ne fallait pas tomber dans le même piège que notre ami et l’accepter, il vaut le coup) et une fille qui s’énerve tout le temps qui fait penser à Orual dans Un visage pour l’éternité.
Le cadre n’est jamais spectaculaire, c’est leurs émotions qui le sont. C’est ce qu’on ressent avec rien avec le rien ! Dans un cadre banal l’auteur fait ressortir dix milles choses.
Leur relation elle n’est jamais claire : peut-être à t-on entendu un je t’aime mais il est totalement noyé par le reste. Ce n’est pas l’amour ou l’amitié qui peut ou qui doit qualifier leur relation, ils le savent pertinemment. Le mieux qu’ils peuvent faire pour la décrire et c’est du jamais vu presque : c’est cette phrase qu’il lui dit, qu’ils se seraient dit ensemble : Je veux manger ton pancréas. Là réside leurs sentiments.
La disparition de cette notion d’amour est révélatrice de l’autre tour que prend l’auteur. Il reprend plusieurs codes traditionnels à sa manière. Vivre c’est se lier avec les autres, pour lutter contre l’indifférence ils ne faut pas se forcer mais accepter les autres, l’amour n’a pas besoin d’être décrit. Comme si cette notion d’amour était une sorte de barrière
Elle lui a apporté l’acceptation et l’ouverture aux autres, mais lui lui a apporté le sentiment d’être unique de ne pas juste constitué une forme de vie comme les 7 milliards d’être humain. Encore ici, s’être lié avec les autres nous rend unique à leur yeux et unique alors en soi. Sakura, devenu modèle pour tous, aimé et elle le sait, elle n’a pas seulement séduit par sa présence réelle mais aussi en seulement 1h les spectateurs. Pourtant, son principe de se lier avec les autres semblent lui faire perdre son sentiment d’être unique, elle ne vit que grâce aux autres et n’a de valeur qu’avec eux. C’est d’ailleurs ce qui l’a amené a s’intéresser à l’intriguant Haru, qui lui s’est défini lui même sans l’aide de ses liens et de cette proximité avec les autres. Il a puisé ses qualités en lui même sans l’aide des autres et sans leur socialisation.
Tout face à la mort n’est pas rose ou niais : Sakura révèle aussi une fille fragile et sensible, terrifiée.Et face à cela, au lieu d’avoir quelqu’un en face qui réagi comme si il avait la science infuse, on assiste à l’impuissance du garçon qui a même honte de sa non-réaction. Tout n’est pas parfait, les personnages n’ont pas toujours le mot juste, ils sont maladroits. Ils se trompent une fois et même recommence une deuxième fois. Alors même quand ils dorment ensemble on retrouve pas le même topos cinématographique. On retient juste qu’il a fui.


Pas de musique ni rien, pas d’angle de vue spécial sauf un qu’on retiendra (allongée, on voit la main de Sakura qui se serre avec un jeu d’ombres quand elle avoue de manière détournée être terrifiée). Juste deux personnages côte à côte qui se côtoient, on a rien besoin de plus
Même lors de la scène du feu d’artifice, l’animation n’a pas grand intérêt, alors que c’était un de ses vœux avant de mourir. Sakura et Haru finissent par ne pas du tout le regarder. En effet, Haru a été pour Sakura plus que tous les vœux qu’elle aie pu faire.
Même si ce cadre sert l’histoire et la simplicité, on peut quand même regretter cette animation trop simplifié, trop minimale.


Ils sont juste à deux, loin des autres, ils s’amusent, rien ne compte pour leur relation ni les apparences ni le paraître ni une sorte de classe sociale. L’amour s’est créé entre deux êtres. Ce n’est pas non plus le sujet (alors qu’il est souvent récurrent) de ce film, qu’ils ne soient pas pareil, pas considérés de la même manière. Cette différence sociale est balayé de la main par Sakura. Et, du côté de Haru, son indifférence lui a quand même crée une abstraction du jugement des autres assez incroyable qui lui permet de rester avec elle.


Le choix : toute rencontre est le fruit d’un choix, le moi a donc une place et ce qu’on peut construire avec une personne ne peut se baser seulement sur du hasard.
C’est un de ces films où ce n’est pas les actions des personnages qui déterminent leur amour mais l’appréciation de la présence de l’autre.
C’était le seul qui pouvait en restant lui même lui apporter le réconfort alors elle qu’il était au courant de sa maladie. Les autres auraient fait l’inverse que ce qu’elle voulait. Il ne lui a pas donné plus de valeur après avoir su pour sa maladie. Et c’est ce qui a permis leur rencontre.


La souffrance n’apporte pas de la valeur (un autre sujet qui touche encore aujourd’hui les adolescents), une idée intéressante.


Enfin, au final, je trouve ça bien que l’auteur ait offert une autre voie pour les amoureux endeuillés. Il ne se contente pas de dire chichement continuer d’avancer et vivre avec les idéaux et tous les rêves de cette personnes. Mais il dit avec sa définition de l’amour qu’on peut aimer une autre fois puisque jamais la liaison entre deux personnes ne pourrait être qualifié alors il n’y a pas de je n’aimerais jamais quelqu’un autant qu’elle.


Une histoire d’amour qui cache un récit moralise didactique et le voyage initiatique d’un jeune garçon à travers la force d’une jeune fille.


  Un appel à la vie, comme Sakura l’entend. Et à la fin on ne peut être que comme Haru voulant répondre à cet appel. 

J’étais obligé aussi de faire à la fin, un parallèle avec A Silent Voice. Un autre film d’animation où un garçon se libère aussi de cet état, et arrive à accepter les autres grâce à la force d’aimer d’une jeune fille sourde. Là où on aura retenu dans A Silent Voice la scène tous les gens qui entourent le protagoniste qui se voient dévoiler d’une croix qui encombraient la vision du monde du garçon, ici on retiendra la figure brillante de Sakura et le mouvement qui l’entoure, ses camarades ont été touchés par sa vision pour accepter les autres.

nana-
7
Écrit par

Créée

le 13 juin 2021

Critique lue 319 fois

1 commentaire

nana-

Écrit par

Critique lue 319 fois

1

D'autres avis sur Je veux manger ton pancréas

Je veux manger ton pancréas
notludovic
9

Que trépasse si mon pancréas faiblit (le chevalier au pancréas)

Oui, ce titre est ridicule. Mais voilà, un nouveau film de lycéens qui vivent des histoires compliquées et que nous, occidentaux, allons encore trouver mièvre sous peine de ne pas faire preuve...

le 16 mai 2019

18 j'aime

7

Je veux manger ton pancréas
lugdunum91
6

Je veux manger ton pancréas: Amour & Pancréas

32eme film de l'année, je découvre cet animé japonais apparemment très apprécié. On suit l'histoire de Sakura, une lycéenne populaire qui se lie d'amitié avec un de ses camarades de classe, taiseux...

le 5 mars 2021

9 j'aime

5

Je veux manger ton pancréas
ryosama
5

Un Pancréas qui ne se mange qu'à moitié

Un film d'animation dans la lignée de A Silent Voice, avec comme d'hab des pattern à la "Your Name" (très gros succès donc recette à suivre j'imagine), le générique et la musique surtout. C'est...

le 9 avr. 2019

7 j'aime

9

Du même critique

Fenêtre sur cour
nana-
6

Piégé

J’avais juste envie de m’échapper, pendant tout le film on était obligé de suivre le point de vue de Jefferies de ne voir que de sa fenêtre et c’était frustrant. Ressentir juste une frustration...

le 14 juil. 2021