Je ne vais pas véritablement faire une critique, Jeanne Dielman, meilleur film de tous les temps, a déjà fait l'objet de dizaines de milliers de pages d'analyse et d'opinion. Quelques pensées en vrac:


  • C'est le film le plus dur à noter que j'ai rencontré, ça aurait pu être 10 comme 5.
  • Même s'il y a des inspirations claires, le film est unique en son genre, mélange subtil d'hyperréalisme et de symbolisme à l'excès.
  • Parmi les inspirations, je n'en citerai qu'une seule, que je n'ai pas vu dans les analyses du film: Ozu. Ces plans fixes, ces décors faussement simplistes, ces cadrages des corps particuliers et ce sens de l'esthétisme, le fait de filmer sans mensonge des scènes de la vie quotidienne… Tout m'a rappelé Ozu.
  • C'est terriblement long et chiant. Alors c'est totalement fait exprès, on s'ennuie et c'est l'effet recherché, mais quand même. C'est chiant.
  • Petite astuce pour sans doute tenir et apprécier le film: faire soi-même des tâches ménagères en le visionnant, en ne s'arrêtant que pour la petite demi-douzaine de dialogues qui ponctuent le film. C'est ce que j'ai fait, je recommande.
  • Les dialogues d'ailleurs, parlons-en, des mots parfois très lourds de sens (la mère : "tu ne peux pas savoir puisque tu n'es pas une femme", le fils : "j'ai voulu me tuer") qui ne rencontrent aucun écho, tellement les personnages sont froids et fermés sur eux-mêmes.
  • Le film est bien entendu féministe, heureusement ce n'est pas tout le film. J'avais peur que ça tourne surtout autour de la prostitution, non le film est plus subtil et original que ça.
  • La performance de Delphine Seyrig est incroyable, je pense qu'on ne s'imagine pas assez la difficulté de tourner des scènes aussi banales sur des durées aussi longues, notamment la scène de la douche au début du film.
  • Les scènes où elle se pose, le regard plus ou moins dans le vide, quand elle parvient à s'échapper d'elle-même, sont de loin les plus touchantes.
  • La vie de Jeanne est aussi millimétrée que le film lui-même, rien n'est laissé au hasard, ni les décors, ni la caméra, ni les mots, et encore moins les gestes de tous les personnages.
  • La symbolique autour du thème de la prison, autant spatiale que temporelle, est dingue. Jeanne est prisonnière dans son monde et dans son rythme, comme les femmes sont prisonnières de tout ce que la société leur impose.
  • La fin est doublement symbolique : conséquence d'une perte de repères et d'une domination masculine humiliante, doublement humiliante puisque consentie.
  • Dans le courant de ce film (hyperréalisme, symbolisme, contemplatif, routinier, etc.), on pense forcément à Perfect Days de Wim Wenders 50 ans plus tard.
  • Le film est impossible à faire à l'époque du Thermomix.
Samji
8
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste Classement Sight and Sound 2022

Créée

le 23 févr. 2025

Critique lue 7 fois

1 j'aime

Samji

Écrit par

Critique lue 7 fois

1

D'autres avis sur Jeanne Dielman, 23, Quai du Commerce, 1080 Bruxelles

Du même critique

Le mal n'existe pas
Samji
5

Dersou Ouzala chez les cinglés

J'étais enthousiaste à l'idée d'aller voir Le mal n'existe pas : un film japonais, contemplatif et esthétique, un conte écologique, le tout par Ryusuke Hamaguchi, le réalisateur de Drive my car, un...

le 13 avr. 2024

35 j'aime

5

Look Back
Samji
5

Manga girl

Look Back est un objet curieux. Tiré d'un manga de l'auteur à succès de Chainsaw Man, manga hyper connu et gore à souhait, il dépeint ici l'apprentissage du manga par deux adolescentes qui vont...

le 29 sept. 2024

12 j'aime

J'ai perdu mon corps
Samji
4

Passez votre che-main

J'ai perdu mon corps est le film typique d'une fausse poésie. En enlevant la seule originalité du film, qui consiste dans les pérégrinations d'une main coupée à Paris pour retrouver son propriétaire,...

le 20 févr. 2023

10 j'aime