Jamais un film n'aura autant réussi à me faire rentrer dans le quotidien de quelqu'un au point où l'on ne sait plus vraiment ce que l'on regarde. On est assit dans le confort de cet appartement grâce à une mise en scène simpliste et familière. On s'y sent comme chez soi, on connait la disposition de l'appartement, on a nos repères, on connaît les habitudes de Jeanne et Sylvain au point où quand quelque chose est mal fait on le remarque tout de suite, la lumière n'est pas éteinte, l'assiette est mal essuyée, heureusement c'est de suite corrigé par Jeanne. A aucun moment nous ne sommes bousculés.
Grâce à une lecture laconique et expédiée mais terriblement efficace d'un point de vue narratif d'une lettre reçue de sa soeur on apprend tout ce qu'on à savoir. Ce sera tout ce qui nous sera donné, le reste on le devinera au travers des regards vides, des tâches répétitives, des silences, des habitudes et de cette rigueur abusive qu'elle s'impose au quotidien.
Je n'ai pas envie de tomber dans l'analyse facile qui serait de dire que c'est une critique de la femme au foyer et de l'abrutissement par le travail. C'est évidemment vrai mais le film semble être plus intelligent que ça et tente de mettre en scène de manière radicale le quotidien banal d'une vie. On se reconnait tous un peu dans ces scènes, dans cette façon de s'occuper, de tuer le temps, de donner un sens à la vie, en s'imposant parfois des préceptes inutiles mais qui permettent de garder le cap.
Tout le long j'interprétais ses silences et ses regards vides par une hésitation de sa part et par le fait qu'elle allait exploser à un moment en envoyant tout bouler ou en se suicidant. Mais cette fin est encore plus folle et innatendue.
J'ai passé 3h20 à regarder une femme faire des tâches ménagères dans un minimalisme le plus total et pourtant je ne me suis pas ennuyé et j'ai même pris une leçon de cinéma.