Jenny est le premier film réalisé par Marcel Carné, et il part d'une histoire originale. Ce dernier a été assistant réalisateur de Jacques Feyder, qui a eu pour épouse Françoise Rosay, et celle-ci s'entendait si bien avec Carne qu'elle lui a promis que le jour où il se lance dans le long-métrage, elle le ferait de manière bénévole ! Du coup, le financement a été très facile, Françoise Rosay étant une grande vedette de cette époque, et Carné a eu comme coscénariste pas moins que Jacques Prévert, avec qui il va collaborer durant des années, dont bien entendu Les enfants du Paradis.
Jenny est une femme qui tient officiellement une boite de nuit ; en fait, c'est une couverture pour un lieu de rendez-vous et de jeux. Elle voit arriver sa fille, qui a rompu ses fiançailles, qui va jeter son dévolu sur son jeune amant.
Le film est indiscutablement porté par son trio de comédiens ; Françoise Rosay, Lisette Lanvin et Albert Préjean, pour une drôle d'histoire triangulaire. Il faut souligner, pour un premier essai, la qualité de la mise en scène, avec des travellings et un tournage en extérieurs, ce qui était rare à cette époque. De plus, on sent déjà la verve de Jacques Prévert, notamment lors de la rencontre entre Lisette Lanvin et Albert Préjean sur un pont, qui semble préparer à Drôle de drame quelques années plus tard.
Cela dit, c'est bien dialogué, mais peut-être un peu trop par moments, car on sent qu'ils ne sonnent pas naturels. De plus, on aurait aimé connaitre cette boite de nuit, avec par moments des types assez bizarres qui la fréquentent, mais Jenny est un très joli galop d'essai, couronné de succès à sa sortie, et qui va lancer mine de rien un des grands réalisateurs du cinéma français.