Jerry Schatzberg, du haut de ses 96 ans, est un petit papy qui paraît avoir trente piges de moins et caracole comme personne : il nous double sur le trottoir, trop pressé d'aller présenter le documentaire qui le met en vedette. On veut bien le dixième de l'énergie et de la force de caractère de ce Monsieur, clairement. Une fois qu'on atteint nous-même la salle de projection (trois plombes après la fusée dont la canne ne touche finalement jamais le sol), l'hommage à ce photographe, metteur en scène, homme-multitâches commence, et se poursuit par la diffusion de Jerry Schatzberg, portrait paysage de Pierre Filmon. Un peu à la façon du Visages Villages d'Agnès Varda (si vous ne l'avez pas vu : foncez-y vite), on suit les pérégrinations de l'artiste accompagné par le réalisateur dans la dernière expo qui le met à l'honneur. Photos portraits de vedettes, instants volés (la photo du parapluie nous a tapé dans l’œil), anecdotes sur ses films, ragots sur ses rencontres avec d'autres artistes, Jerry Schatzberg se livre à toute vitesse (on a l'impression que ce Monsieur a toujours eu ce rythme effréné : le réalisateur ne suit pas, lui non plus ! On se sent moins seul), sans pour autant nous submerger d'infos. On a le temps de regarder l’œuvre, d'écouter ses anecdotes, de mieux cerner la photo au fur et à mesure de ce qu'il raconte, et finalement on découvre un artiste dont on n'avait jamais entendu parler (connu surtout dans le milieu de la photo). Les derniers instants du documentaire sont assez drôles, car le papy croit en avoir terminé, prêt à repartir, et il manque une œuvre : "Quoi ? Il en reste encore une ?!", et le voilà qui fonce à toute berzingue vers la salle d'à côté où se trouve le tableau, plantant sur place la caméra. On adore le fait que Filmon a laissé tous ces moments qui pourraient être considérés comme des "ratés", tout comme quand il questionne Jerry sur une info qu'il n'a pas donnée dans son explication, il pourrait simplement refaire la scène, mais non : cela fait partie du personnage, on le cerne vraiment bien tant dans ce qu'il dit, que dans ce qu'il n'a pas le temps de dire. Un très beau documentaire qui nous a fait découvrir Jerry Schatzberg comme si on y était, et même mieux, puisqu'on n'aurait pas pu le suivre.

Aude_L
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le 8 nov. 2023

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