Caleb Landry Jones est vraiment stupéfiant, nous ayant tour à tour fait peur, pitié, pleurer (l'interprétation d’Édith Piaf en clair-obscur, transcendée, avec un montage si passionné, on ne pouvait faire autrement que de dégainer la larme...). Pour nous, ce Dogman poisseux et émouvant signe le grand retour de Monsieur Besson (venu présenter le film en salle, à la surprise générale - il ne devait présenter que la séance du Grand Palais de Deauville, pas celle des "ploucs" comme nous) qui enchaîne les scènes "viscérales" (celles qui vous font réagir, sur votre fauteuil, quelle que soit l'émotion), pour un spectacle vécu de l'intérieur. Parmi les scènes où l'on a senti notre self-control s'amoindrir (pour le meilleur) :
celle où le grand type empêche cet homme éploré en fauteuil roulant de jeter son bouquet de fleurs à la femme qu'il aime, celle du playback d'Edith Piaf (une des meilleures scènes du film), celle du final tendu "dogs eat dogs" (où l'on reste les yeux écarquillés par la violence fascinante)...
Avec un réel amour des chiens (on l'a remarqué bien vite : le film prend grand soin de ne pas faire faire des tours pénibles aux toutous, une rareté dans le cinéma qui confond souvent animal et jouet, alors : merci.), avec une passion débordante pour le personnage fracassé qu'il met en scène (outsider dans tous les sens du terme), qu'on ne devrait pas aimer, et pourtant qu'on ne peut s'empêcher de regarder avec le cœur. Dans ce rôle, Caleb Landry Jones est effréné, respirant la frustration et la tendresse à la fois, donnant toute l'humanité, la puissance, l'âme de ce Dogman qu'on aurait vraiment adoré retrouver pour une suite... Le final a un goût amer, évidemment réussi (on ne peut pas redire à ce dernier plan incroyable
avec l'ombre de la Croix et les chiens, une image d'Idole religieuse assumée et esthétique
), mais amer tout de même pour qui aurait voulu partager encore un peu les péripéties de ce personnage si fort. On sent un héritage très présent du récent Joker de Todd Phillips, et pour nous, c'est encore une fois une expérience viscérale, tout nous appelant uniquement à ressentir le film. Mention au petit aparté final qui laisse, en un plan de (magnifique) doberman
qui surveille la psychologue et son bébé
, planer encore un brin de douceur nostalgique sur un personnage qu'on se justifie d'adorer assez fréquemment, wouaf pour Dogman.