Peut on rapporter la qualité d'un documentaire à son sujet ? Question épineuse difficile à éviter quand on tente de poster un avis sur Jodorowsky's Dune.
En effet, l'histoire de ce film jamais réalisé est tout bonnement fascinante. Comme le souligne l'un des intervenants, la sortie de Dune aurait pu bouleverser totalement l'industrie hollywoodienne moderne avant même sa création. D'où l’intérêt de se plonger dans cette aventure absolument surréaliste menée par un Jodorowsky aussi cinglé que génial. Certaines des anecdotes qui ponctuent, voire constituent le long-métrage, valent clairement leur pesant de cacahuètes. C'est simple, tout semble reposer sur deux piliers: la folie créatrice du réalisateur et un bol monumental. En fait, si Jodorowsky's Dune avait été un docu-fiction, il aurait été doté du meilleur scénario de l'année. Les rebondissements s’enchaînent à un rythme infernal et les différentes personnalités impliquées sont absolument uniques. Mais c'est surtout un humour omniprésent, inévitable étant donné le niveau de folie de l'entreprise, qui fait l'attrait du documentaire le plus divertissant de l'année.
Dans sa conception, le film de Frank Pavich est au final très classique: une introduction, une description chronologique du projet et une conclusion. Abandonnant une voix off qui aurait été inutile vu la richesse des interventions, il compile des interviews réellement précieuses (H.R. Giger nous manquera définitivement) et des séquences animées reposant sur les story-boards. Ces dernières s'avèrent totalement jouissives lorsqu'elles ressuscitent des séquences entières du projet mort-né: quel plaisir de matter cet improbable plan-séquence d'ouverture !
Le résultat financé aurait-il été bon ? La question est hors-sujet. L’intérêt réside dans la constitution d'une vraie fable pop sur le trop-plein de créativité et d'ambition dans un milieu hostile à la nouveauté. Que l'on apprécie ou pas le cinéma de Jodorowsky, impossible de bouder son plaisir face à tant de folie.