I. Introduction : Un film incompris, une œuvre malmenée

Joker : La folie à deux a été accueilli à bras fermés par la médiocrité ambiante, par des critiques et des spectateurs qui voulaient de la poudre aux yeux, de l’action, des explosions, des flammes, du sang. Ils voulaient du Joker à la sauce blockbuster. Mais non, ils ont eu un film qui prend son temps, qui leur balance la réalité en pleine face, une réalité qu’ils ne voulaient surtout pas voir. Résultat : ils l’ont détesté, ils l’ont descendu. Ils n’ont rien compris. Ce film est une claque, une véritable leçon qui dépasse de loin ce que les esprits étroits attendaient. On n’est pas là pour applaudir un psychopathe en liberté, on est là pour décortiquer le système, l’injustice, et toute la crasse qui habite Gotham – et soyons honnêtes, nous aussi.


Là où la critique échoue lamentablement, c’est en croyant qu’ils allaient retrouver le Joker qu’ils connaissent, celui qui incarne l’action débridée et le chaos total. Mais La folie à deux, ce n’est pas ça. C’est une œuvre qui prend Arthur Fleck, cet homme détruit par une vie de violence et de rejet, et qui te montre une facette du Joker que tu n’as jamais voulu admettre : l’opprimé qui finit par exploser, la victime qui, au lieu de susciter l’empathie, devient ton exutoire pour toute la violence que tu ne veux pas assumer.


II. Le Joker : Symbole de l'injustice et catharsis des spectateurs

Le Joker, ce n’est pas juste un clown qui balance des vannes et plante un couteau dans le dos de tout ce qui bouge. Non, le Joker, c’est le reflet de la société qui l’a créé, c’est l’opprimé qui a décidé de se lever et de dire "assez". Tu veux de l’action, des fusillades, des courses-poursuites ? Désolé, ce film n’est pas là pour flatter ton besoin d’adrénaline facile. Le Joker ici, c’est l’injustice personnifiée. Il représente tout ce que toi, spectateur, tu refuses d’admettre. Il est la violence que tu réprimes et que tu veux voir exploser sur grand écran pour soulager tes petites frustrations du quotidien.


Et là, ce qui est magistral dans Joker : La folie à deux, c’est que le personnage dépasse même l’écran. Le Joker, il n’est pas qu’à Gotham. Non, il franchit le quatrième mur, il t’arrache à ton fauteuil de cinéma. C’est toi qui veux voir du sang, c’est toi qui projettes ta haine, tes frustrations, ta violence sur lui. Ce n’est plus un simple personnage : c’est une catharsis géante, une purge collective. À travers lui, tu veux voir les puissants tomber, tu veux jouir de l’anarchie sans avoir à lever le petit doigt. Joker, c’est ta part sombre, c’est ton besoin viscéral de voir le monde se fissurer, mais sans en assumer les conséquences. Et c’est là que le film devient génial : il te balance ça en pleine face sans même que tu t’en rendes compte.


III. Arthur Fleck : Un homme brisé, non un super-vilain

Arthur Fleck, ce n’est pas le Joker. C’est un déchet, un pauvre gars que la société a piétiné, craché dessus, et qui a fini par se laisser glisser dans le caniveau. Ou plutôt, on l’y a foutu sans remords. C’est l’incel ultime, celui dont personne ne veut, celui dont la vie n’a été qu’une suite interminable de coups bas et d’humiliations. Sa propre mère ? Un monstre. Ses voisins ? Ils le regardent comme on regarde un clochard. Ce type, il n’est rien, il n’a jamais été rien. Mais voilà le truc : c’est ça, justement, qui en fait une bombe à retardement.


Le Joker, c’est pas un rôle qu’Arthur a choisi. C’est une foutue fatalité. T’as déjà vu quelqu’un se faire rouler dessus jour après jour et continuer de sourire ? Non, évidemment. Alors quand il finit par péter un câble, tu t’étonnes que le sang coule ? Joker, c’est la rage qui s’accumule, qui déborde, qui explose. C’est pas un mec qui décide de devenir méchant parce que c’est cool, c’est un gars qui en a tellement bavé qu’il ne sait plus quoi faire à part tout détruire. Arthur Fleck n’a jamais voulu être le Joker, il voulait juste exister, avoir un peu de reconnaissance, peut-être même un peu d’amour. Mais le monde lui a bien fait comprendre que tout ça, c’était pas pour lui. Alors il est devenu ce qu’on attendait de lui : un monstre.


Et là, toi, le spectateur, tu te régales. Parce que tu l’as vu souffrir, tu l’as vu se faire humilier, et maintenant, tu veux voir jusqu’où ça peut aller. Tu veux voir le sang couler, tu veux voir la société trembler. C’est pour ça que tu viens, non ? Pas pour sauver Arthur, pas pour le comprendre. Tu veux juste le Joker, tu veux que ça éclate, tu veux que ça saigne.


IV. Harley Quinn : Manipulatrice dans une société de l’attention

Harley Quinn, c’est pas la poupée cassée que tu crois reconnaitre. Non, dans La folie à deux, elle est pire. Elle est celle qui joue avec les tripes d’Arthur Fleck comme un putain de chat avec une souris. Mais ce n’est pas l’amour, ce n’est pas une tragédie romantique à la sauce « Bonnie and Clyde » que tu t’attends à voir. Non, Harley, c’est la pop star décadente de notre époque, prête à tout pour avoir ses putains de cinq minutes de gloire. Dans ce monde, peu importe que ce soit du buzz ou du bad buzz, pourvu que ça clique. Tout est bon à prendre pour occuper le devant de la scène. Et toi, spectateur, t’es là, tu regardes, t’es complice, et tu bandes sur cette misère. Parce que c’est ça que t’es venu voir, du trash, du sale.


Arthur ? C’est juste un pauvre gars en manque d’amour, ce besoin désespéré de sentir qu’il existe pour quelqu’un. Et Harley, elle, elle le sent, elle sait qu’il a un trou béant là où son âme aurait dû être. Alors elle s’engouffre dedans. Pas par amour, non, mais parce qu’elle sait que ça va lui servir. Arthur, c’est sa carte de visite, son tremplin médiatique. Elle lui donne quelques miettes d’attention, elle le laisse croire qu’il a enfin trouvé quelqu’un qui le voit, qui le comprend. Mais tout ça, c’est du pipeau. Elle lui chante des belles sérénades pour mieux le foutre à terre. Harley n’a jamais voulu Arthur, elle voulait le Joker. Le monstre. Le showman. L’incarnation du chaos.


Et toi, specteur, tu es complice, t’en as rien à foutre d’Arthur Fleck, de son humanité et de sa souffrance. Non, toi, ce que tu veux, c’est voir la bête en action. Tu veux du Joker. Et Harley le sait. Elle n’a pas besoin d’un homme sensible, elle veut le carnage, elle veut l’adrénaline pure, celle qui te fait vibrer, toi, dans ton fauteuil avec ton gros seau de popcorn. Arthur, il n’a jamais été qu’un jouet. Et toi, tu veux qu’il explose, tu veux qu’il crève pour que le Joker prenne la place. Parce qu’au fond, c’est ça qui t’excite : voir jusqu’où ça peut aller, voir qui va sauter le prochain.


V. L’explosion du quatrième mur : La libération et la mort d’Arthur

Et là, bam, le mur du tribunal explose. Tu te dis "ah enfin, un peu d’action". Mais attends, c’est pas ce que tu crois. Ce n’est pas un commando armé jusqu’aux dents qui vient libérer Arthur Fleck. Non, c’est toi. Oui, toi, spectateur, planqué derrière ton écran, c’est toi qui viens de le libérer. Parce que tu veux quoi ? Encore une fois, tu veux du Joker, tu veux que ça pète, que ça saigne. Les types grimés en Joker, ce ne sont pas ses partisans, c’est toi et tous les autres comme toi, ceux qui veulent voir du chaos, du carnage, du sang. Et là, tu t’y vois, hein ? Avec ton maquillage de clown, ton rictus malsain, prêt à foutre le bordel dans Gotham. Mais en réalité, c’est juste ton envie de purger tes propres frustrations qui s’affiche à l’écran. T’as jamais voulu aider Arthur, non, tu veux qu’il se transforme, qu’il soit ton exutoire. Parce que le Joker, c’est ton gladiateur personnel, celui qui va défier les puissants pendant que toi tu te délectes de la violence. Ironique, non ? T’es là à gueuler contre les injustices du monde, mais tout ce que tu veux, c’est qu’un autre fasse le sale boulot à ta place.


Et Arthur, dans tout ça ? Il court, il croit qu’il va retrouver Harley, sa "douce". Mais elle, elle l’attend avec une jolie chanson, la douce mélodie de son rejet. Tu vois l’ironie ? Ce pauvre type, encore une fois, se fait piétiner. Il pensait trouver un peu d’amour, mais non, Harley n’a jamais voulu de lui. Elle veut le Joker, cette bête médiatique, ce showman. Arthur, l’homme fragile, sensible ? On s’en fout. Ce n’est pas ce que le public veut. Et encore moins ce que Harley veut. Elle veut du spectacle, et elle va lui en donner. Arthur comprend, trop tard, que tout le monde se fout de lui. On l’a trahi, on l’a humilié, encore une fois. Parce que tout le monde veut le Joker. Et Arthur n’est qu’un fantôme, un souvenir pathétique d’une vie qu’il n’a jamais vraiment eue.


Et là, la cerise sur le gâteau : il se fait buter dans les couloirs de la prison. Pas de grande évasion, pas de final flamboyant. Non, juste une mort pathétique, comme un chien qu’on abat. Et le pire ? C’est toi qui l’as tué, toi et les autres spectateurs. Personne ne voulait d’Arthur Fleck, personne n’a jamais eu d’empathie pour lui. Ce que tu voulais, c’est du Joker. Et quand il meurt, c’est pas une tragédie, c’est une transition. Le masque passe à un autre. Parce que ce n’est pas Arthur qui compte, c’est le symbole. C’est le Joker qui te fait vibrer, pas l’homme derrière. Ironique, hein ? Arthur n’a jamais existé pour toi. Il n’a jamais été qu’un outil, une marionnette, pour que le show continue. Et quand il crève dans son propre sang, t’as déjà les yeux rivés sur le prochain Joker qui émerge. Le roi est mort, vive le roi. Le spectacle doit continuer.


VI. Conclusion : Le reflet d’une société malade

Joker : La folie à deux n’est pas seulement un film sur un personnage dément, c’est un miroir tendu à notre société. Une société violente, où l’injustice est omniprésente, où la souffrance des plus fragiles est devenue un spectacle ordinaire. Arthur Fleck, ce n’est pas qu’un homme brisé, c’est le produit d’un monde qui écrase ceux qui ne rentrent pas dans les cases. Le film ne te montre pas un héros, ni même un méchant, mais une société qui se nourrit de sa propre cruauté. Une société qui crée des monstres parce que, quelque part, elle en a besoin pour justifier sa propre existence.

La violence systémique ne vient pas seulement de quelques individus, elle imprègne chaque recoin de cette civilisation. Que ce soit dans les rues de Gotham ou dans notre propre réalité, les opprimés sont broyés, exploités, ridiculisés, jusqu’à ce qu’ils explosent. Arthur Fleck n’a jamais eu de chance, il n’a jamais eu de choix. Ce que le film montre avec une lucidité glaçante, c’est que dans une telle société, la violence n’est pas une anomalie, c’est la règle. Et cette règle, elle s’applique à tous, des puissants aux opprimés, en passant par les spectateurs. On la consomme, on l’encourage, même sans s’en rendre compte.

Au final, Joker : La folie à deux nous montre que cette violence, ce chaos, ne sont pas exceptionnels. Ils sont systémiques, ils sont la nature même du monde dans lequel on vit. Arthur Fleck n’est pas un accident, il est l’enfant de cette société du spectacle, où tout est réduit à une performance, où la souffrance devient du divertissement, et où la catharsis collective justifie tout. Le roi est mort, mais la société qui l’a créé est toujours là, prête à façonner le prochain, car la machine ne s’arrête jamais.

Romain_Prt
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le 12 oct. 2024

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Romain Prt

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