Jour de colère est un démenti à tous ceux qui pensaient que Dreyer n'avait pas su s'adapter au cinéma parlant. Alors oui, certes ce film est très proche plastiquement de l'univers du muet mais ça ne le rend que plus riche.
Il s'agit ici d'une chasse aux sorcières dans le Danemark du XVIIème siècle. Nous pouvons bien sûr y voir une allégorie de la diabolisation de l'occupant allemand toujours présent en 1942 pendant le tournage du film mais ce serait mésestimer Dreyer que de n'y voir que ça.
Nous sommes en 1623 et une vieille femme du village est accusée de sorcellerie. Pour se protéger de ses poursuivants, elle se réfugie chez la jeune femme du pasteur, veuf tout fraîchement remarié.
Anne, la jeune épouse prépare la maison pour le retour du fils de son pasteur de mari, Celui-ci, plus âgé qu'elle crée un lien troublant avec "sa jeune mère".
La religion et les considérations morales sont omniprésentes et guident les personnages tout au long de leur parcours. Le doute qui s'empare de chacun d'eux tour à tour est superbement filmé. Les yeux, les visages, les regards... sont extrêmement parlants. Le muet est tout proche, rappelez vous ! On en vient à partager le trouble et les sentiments d'Anne pour "son jeune fils".
La culpabilité d'Absalon, réside bien ailleurs. En tant que pasteur, son devoir est de ramener les brebis égarées sur le droit chemin et de punir celles qui s'égarent. La vieille femme, sur le bûcher lui rappelle la faute commise.
Celle qui le condamne aux yeux de son Seigneur. Sa femme en est le prix !
D'ailleurs l'égoïsme des hommes sera mis en avant dans une scène au cours de laquelle Absalon et sa femme ont une conversation. Elle lui demande des précisions : "As-tu sauvé ma mère pour m'avoir ?
- N'ai-je pas été un bon mari ?
- T'es-tu jamais demandé si je t'aimais ?"
Il n'a pensé qu'à lui et à son bon vouloir.
Le sort de Anna se lie à celui de Martin pour le meilleur et pour le pire...