Sur le papier, "Giornata nera per l'ariete" ne se distingue pas particulièrement de la horde de gialli qui sortirent après le succès de "L'uccello dalle piume di cristallo" de Dario Argento. Le film reprend les codes du genre, avec son titre mêlant animaux et couleurs (ne manque que les chiffres !), ou son héros journaliste pris au centre d'une série de meurtres sordides.
Tandis que Luigi Bazzoni a une carrière peu prolifique de réalisateur. Néanmoins, celui qui nous intéresse ici, c'est... son cousin (!), le légendaire chef opérateur Vittorio Storaro. Aujourd'hui célèbre pour "Apocalypse Now" et à l'époque pour "Il Conformista", il baignait déjà dans le giallo, puisqu'il avait travaillé sur "L'uccello dalle piume di cristallo", contribuant à populariser le genre.
Et il faut saluer ici son énorme travail, qui donne une grande partie de la saveur au film. D'abord sur les tueries, assez remarquables. Peu graphiques et très peu sanglantes (chose rare pour un giallo !), mais les focales, le découpage, et les jeux d'ombres les rendent baroques et cauchemardesques à souhait.
Outre ces séquences qui font forte impression, les personnages du film semblent évoluer en permanence dans une prison géométrique de verre et de métal. Le chef opérateur et/ou réalisateur semblent obsédés par les lignes, quelques fois verticales, et surtout horizontales. Tours de verres, longues marches rectilignes, persiennes dans presque toutes les pièces, et à l'occasion des escaliers en hélices paraissant vertigineux. De quoi donner une ambiance singulière et oppressante, et beaucoup de classe à l'ensemble.
A côté, Franco Nero campe un protagoniste intéressant. Un journaliste engagé, mais au bout du rouleau, complètement alcoolique. Sauf que que l'intrigue associée piétine quelques peu. Comme d'habitude dans le genre, la police est inutile. C'est notre héros qui mène l'enquête, mais il fait assez mollement dans l'acte central, jusqu'à un final plus ou moins imprévisible.
C'est vraiment dommage, car avec en prime une musique signée Ennio Morricone, ils ne sont pas passés loin d'un classique du giallo. Le film se dresse néanmoins aisément dans le haut du panier du genre.