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Les films de Chang Cheh, ceux de Chor Yuen, les œuvres de Lau Kar Leung ou les sympathiques longs métrages de Tony Liu. Autant de réussites du cinéma martial que l'on doit à la Shaw Brothers. Cela nous ferait presque oublier que le vénérable studio est aussi responsable de pas mal de nanars. Heureusement (sic !), Journey Of The Doomed vient remettre les pendules à l'heure ! Cette production, tendance fin de règne, avait pourtant quelques atouts à faire valoir : Un casting avec des vrais talents du genre et une orientation très « années 80 ». Mais pour faire valoir ces bons points il aurait fallu un metteur en scène inspiré, ce qui n'était visiblement pas le cas de Cha Chuen Yee ou du chorégraphe Lam Moon Wa.

Le maître mot du film est simple : Sous exploitation.
Dans son exploitation du genre d'abord. Présenté comme un Wu Xia Pian, Journey Of The Doomed n'assume pas vraiment sa filiation, préférant se complaire dans une histoire d'amour gnangnan et dans l'exploitation érotique vulgos. Pourtant il y avait matière à un honnête film de genre. La jeune princesse étant recherchée par deux camps opposés et assistée par Tung Wei, l'intrigue une fois posée aurait pu se développer sous la forme d'une course poursuite haletante, permettant aussi d'installer l'histoire d'amour pendant les moments creux. En lieu de cela, une fois avoir posé les bases de son histoire de manière extrêmement lourde (il suffit de voir comment il préfère s'attarder sur une scène de dépucelage kitsch), Cha bifurque immédiatement vers l'exploration de la relation Tung Wei/Fu Yin Yu. Enfin, exploration est un bien grand mot... Les personnages sont grossièrement décrits, la princesse a tout d'une nunuche qui ne semble être capable que de mouiller ses vêtements ou faire la moue. Tung Wei, lui, est un espèce de grand nigaud pris de brusque accès de libido, un peu plus charismatique que sa compagne certes, mais pas de beaucoup. Tu parles d'un couple vedette ! Journey Of The Doomed étant principalement basé sur cette relation, le pauvre spectateur est condamné à souffrir.

D'autant plus que le film est aussi sous exploité niveau action. Les possibilités de combats ne manquaient pas pourtant, mais Chuen Yee n'ose jamais franchement envoyer la sauce. Et quand, enfin !, il se décide à enclencher l'action, les chorégraphies sont réduites à quelques mouvements simples, digne d'un film de Van Damme. Incompréhensible quand on connaît les capacités martiales de Tung Wei. Le pire tenant certainement au personnage de Kara, totalement sous employé (on vous avait dit que c'était le leitmotiv du film !). La pauvre se contente de donner quelques vagues coups d'épée dans une poignée de scènes avant de se faire bêtement tuer. Ca frôle le n'importe quoi ce type de décisions artistiques... Il n'y a guère qu'à la fin où Cha et Lam se réveillent en proposant une démonstration pyrotechnique correct mais dénuée d'intérêt vu l'absence d'émotions que l'on éprouve pour les personnages.

La sous exploitation touche aussi l'esthétique générale du film. A vrai dire, pour la première partie du métrage, la question ne se pose même pas. Tourné dans les studios de la Shaw, on se croirait revenu 10 ans en arrière, dans un film d'exploitation à la Legends Of Lust. Pour un long métrage de 1985 c'est assez gênant. Les choses évoluent quand la poursuite commence. On se retrouve majoritairement en extérieur et les costumes dénotent par une inspiration occidentale voire même Mad Maxienne ! Ce coté « eighties » est renforcé par quelques passages musicaux à tendance rock. Une initiative salutaire, il est bon de moderniser le Wu Xia Pian pour répondre aux évolutions du public. Mais Cha Chuen Yee ne va jamais plus loin que ça, se contentant de ses costumes et de ses quelques extérieurs. Pourtant, piocher dans les mythes Européens et autres influences occidentales pour les « Wu Xia Pianiser » lui ouvrait bien des possibilités. Possibilités toujours supérieures à son scénario minimaliste. Une autre option aurait été de renforcer l'inspiration Mad Maxienne et faire une sorte de Wu Xia Pian post apocalyptique (à base de décors ravagés entre autres choses), sorte de prototype d'un The Blade. Rien de tout ça hélas. En l'état on doit se contenter de ces maigres apports qui sont bien insuffisants pour faire diversion des énormes défauts du film.

Quand à la sous exploitation des acteurs, elle a déjà été évoqué pour Tung Wei et Kara, précisons juste que Candice Yu et Max Mok ne sont pas non plus à la fête avec leurs personnages et le tableau est complet !

A voir un film comme Journey Of The Doomed on comprend mieux pourquoi la Shaw Brothers a peu de temps après arrêté sa production cinématographique. Le film synthétise tous les défauts dans lequel le studio s'était empêtré à la fin des années 70/début 80 : Exploitation racoleuse et surtout incapacité de se renouveler. Quand à Journey Of The Doomed proprement dit, il ne mérite qu'une chose : Retourner à l'oubli dont les rééditions de Célestial l'avait sorti.
Palplathune
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le 24 févr. 2011

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