An de grâce 1914, la 1ère guerre mondiale éclate et emporte dans son sillon des millions d’hommes et de vies. Qu’ils s’y engagent de gaieté de coeur ou bien enrôlés de force, la réalité du combat reste la même et finit fatalement par miner le moral des troupes. Dès l’introduction, le désespoir et la désillusion se lit sur les visages de ces soldats la baïonnette au canon, paquetage sur le dos, la peur au ventre, parés à l’offensive qui sera bientôt donnée pour envahir les tranchées ennemies. Comment motiver les troupes à l’approche des festivités autrement que par l’alcool et la ferveur patriotique qu’on leur martèle depuis le début du conflit.
L’assaut est donné, poilus et écossais seront nombreux à mourir au champ d’horreur et pour si peu. 15 minutes à peine d’occupation dans le camps adverse avant de devoir faire machine arrière. Des pertes côtés allemands sont également à déplorer. La fureur du champ de bataille est brièvement esquissé mais ce n’est pas tellement sur ce front que Christian Carion va tenter de rivaliser avec ses prédécesseurs que sont Kubrick (Les Sentiers de la Gloire), Bertrand Tavernier (Capitaine Conan) ou bien Jean-Pierre Jeunet (Un Long dimanche de fiançailles) mais bien dans l’exposition d’un événement bien trop souvent occultés des livres d’histoire y compris pour les nouvelles générations. Une « haute trahison » qui va amenés plusieurs destins à se croiser en cette soirée de réveillon.
Sachant qu’il est question de rapprochement et de communion, nous retrouvons un casting cosmopolite à la distribution : Gary Lewis dans le rôle d’un pasteur brancardier, Guillaume Canet alors jeune espoir français interprète le lieutenant Audebert face à son confrère Daniel Brühl star montante du cinéma allemand. On retrouve également Dany Boon qui fera de ses facéties de chti’ son fond de commerce dans le cinéma. Benno Fürmann en ténor d’opéra, ou bien la magnifique Diane Kruger cette ange tombée du ciel hollywoodien venu se mêler à la rudesse des tranchée afin de jouer les soprano. Et c’est encore sur des seconds rôles comme Michel Serrault, Suzanne Flon, ou bien Bernard Le Coq qu’il faut également compter parmi cette réunion de grands noms. Il faudra attendre que Quentin Tarantino daigne s’y mettre lui aussi (Inglourious Basterds) pour retrouver une telle synergie faisant la part belle au verbe et au respect des langues étrangères toutes représentés ici. Les responsables ont d’ailleurs eu le bon goût de ne pas traduire l’intégralité des dialogues, quitte à se faire quelques ennemies parmi les paresseux qui ne jurent que par la VF.
Face à la noblesse des intentions et à l’utopie marketing d’un tel projet, on ne peut que s’interroger sur la crédibilité historique à accorder à une telle fiction. Pourtant, les historiens sont formelles et ce en dépit des preuves, témoignages et photographies détruites côtés français. Joyeux Noël est une histoire vrai, un authentique conte de Noël qui s’est produit en de maintes endroits du front. Ce soir là, les soldats ont fait un peu plus que de prendre du bon temps et de s’échanger du tabac, du vin et des plaquettes de chocolat. Ils ont fraternisé au son de l’Ave Maria. Un rapprochement rendu possible grâce au lyriques universelles entonnés aux quatre coins des tranchées, poussant les officiers à faire le premier pas pour effectuer une réunion au sommet et s’accorder une trêve hivernale. Au signal des fusées lancés dans le ciel, chaque camps a investit le No man’s land pour un faire un terrain de jeu dédié à la camaraderie, aux parties de football, jeux de cartes, et autres grivoiseries.
Evidemment, on pourra reprocher à Christian Carion son image d’Epinal un brin mielleuse. Il faudrait certainement plus que des petites bulles et des chants de Noël pour pardonner la mort d’un frère tombé au combat. Cette défiance et colère de quelques combattants, le film l’esquisse sommairement avec le portrait de Jonathan un écossais qui ne pardonnera jamais mais qui ne viendra pas pour autant jouer les troubles fêtes. Car Joyeux Noël a avant tout une portée humaniste, visant à redonner de l’espoir en l’humanité, tout en soulignant la bêtise de celle-ci comme cet épisode du chat fusillé que le réalisateur a préféré ne pas montrer pour éviter de heurter la sensibilité du public. En revanche, la plongée dans les lignes arrières permet de mettre en lumière les réunions et sauteries des vieilles badernes qui ne vivaient pas la même réalité de la guerre. Par ailleurs il est assez émouvant de voir ces processions de casques à pointes, de poilus et écossais affublés de cornemuse s’éprendre d’amitié et faire voler en éclat cette propagande abstraite de l’ennemie de la nation dicté par des enfants durant l’introduction devant une classe toute ouïe.
Cette mutinerie ne sera pas sans occasionné quelques heurts et insubordinations auprès de la hiérarchie militaire ne tolérant pas ces écarts de conduites. Finalement, l’état major bien aidé par l’église y mettront le Holà, et les artificiers sonneront le glas de la récré. Autant vous dire que l’addition sera corsé : les dissidents allemands seront envoyés sur le front de l’orient arpenter l’hiver sibérien, et les français ne seront pas mieux lotis et envoyé dans l’enfer de Verdun… Alors… Mettez les guirlandes, allumez le sapin ! La damnation peut attendre demain, car aujourd’hui grande première… c’est Noël à la guerre ! Que les bombes, et les coups de feux s’arrête le temps de cette fête !
En cette période de festivités où il convient de se réunir en famille, d'ouvrir les cadeaux et de déguster une bonne pintade fourrée. L’Écran Barge vous propose de déterrer la hache de guerre en pervertissant l'esprit de Noël. Cette sélection de films saisonniers accompagnés de critiques virulentes et acerbes est donc réservés aux viandards, aux bisseux, aux tueurs de masses, aux durs à cuirs, aux frustrés et à tous ceux qui ne croient plus aux bons sentiments et à la paix dans le monde depuis bien trop longtemps.