Une nuit, dans un poste de garde situé sur la frontière entre la Corée du Nord et la Corée du Sud a lieu une fusillade lors de laquelle deux soldats du Nord trouvent la mort. Afin de calmer les graves tensions qui en découlent, le lieutenant Sophie Jean (Lee Young-ae) est envoyée pour éclaircir les circonstances du drame.
Survenu à un moment où les relations entre la Corée du Sud et la Corée du Nord allaient en s’améliorant, JSA (Joint Security Area) détonne par une remarquable absence de manichéisme, refusant de faire automatiquement des Coréens du Nord les méchants. Car s’il s’intéresse au conflit entre les deux pays, Park Chan-wook décide de se placer au niveau humain, en se concentrant sur le plus bas échelon de décision, puisque les personnages principaux, si l’on oublie l’enquêtrice, sont les soldats gardant les postes-frontières entre les deux nations rivales.
Malgré le déséquilibre qu’elle induit, la structure du film, se focalisant dans un premier temps sur l’enquête elle-même, puis dans un second temps sur les relations entre les acteurs du drame avant ce dernier suivi d’un épilogue revenant à l’enquête, nous permet de nous attacher pleinement à des protagonistes dont on n’oublie pas de montrer l’humanité avant toute chose. C’est ainsi que l’on peut à la fois rire et pleurer aux côtés des personnages, qui brisent les interdits pour fraterniser malgré la frontière et les idéologies contraires qui s’y opposent. Mais ce spectacle poignant ne peut cacher l’inconscience dont font preuve les soldats en ne mesurant pas les conséquences de leurs actes, et Park Chan-wook réussit parfaitement à nous émouvoir sur une situation filmée avec délicatesse sans pour autant oublier de nous rappeler, peut-être même de manière involontaire, le côté utopique de l’histoire qu’il conte.
Car si l’on s’est enthousiasmé pour une belle histoire de fraternité entre soldats ennemis, on ne peut oublier que ce récit touchant à l’échelle des personnages ne peut qu’engendrer des conséquences funestes à des échelles qui dépassent largement ces derniers. C’est tout le génie de Park Chan-wook d’avoir ainsi su le restituer, transformant ce qui aurait pu être une comédie dramatique légère et sympathique en tragédie poignante. Deux tableaux sur lesquels JSA (Joint Security Area) réussit parfaitement.