‘Pamplemousse’, pas seulement parce que la belle Kate Winslet nous montre les siens, un instant…
Allongée sur le dos, arborant le bon vieux persil à l’ancienne (au lieu de l’abominable ticket de métro ou de la rebutante rase-motte)
Sphérique, quasi parfait, plein, épais, résistant… savoureux et amer
Malgré un fil blanc scénaristique taillé comme un câble d’amarrage de supertanker
On nous colle sous les yeux en permanence un petit de 8 ans en train de s’occuper de ses petites sœurs pour qu’au moment de l’atroce jalon (le bambin laissé incompréhensiblement seul avec elles les étrangle… puis se pend !) « ça passe crème », comme on dit maintenant au pays de d’Horror Bergé & Danièle Obono…
, le parcours chaotique de ce jeune homme lucide, doux mais ambitieux — Jude (Christopher Eccleston, aux airs iancurtisiens fatalement enjôleurs) — m’a donc enthousiasmé.
Comment un individu sensible, volontaire et aimant peut-il s’en sortir dans un monde-carcan ?
C’est grosso modo le sujet de Jude.
Périple circulaire d’un Jude doublement déterminé se cognant contre les obstacles, les avalant, ravalant sa salive et ses pleurs, mais ne cédant jamais.
Il geint souvent, seul, Jude, mais dans l’adversité, dans la douleur, se domine.
La contenance, c’est ce qui d’ailleurs fait la force de ce film, maîtrisé de bout en bout.
Récit, jeu des acteurs, reconstitution, dialogues serrés… et une photographie, des plans, somptueux — renforçant d’ailleurs la petitesse des protagonistes (écrasés par des éléments tangibles qui prennent pourtant l’effroyable visage du Destin).
J’ai aimé la délicatesse, la retenue, dans l’expression des sentiments, des désirs, des ambitions, des craintes, des déceptions…
J’ai adoré les nuances, les atermoiements, les résignations, les jeux (involontaires), les douleurs… dents-serrées.
La scène d’acceptation par le mari de Sue (Liam Cunningham, superbe) de la laisser partir m’a beaucoup ému par sa froideur, sa douleur sourde
I… I have a wife I love, who not only doesn’t love me, but I disgust her.
Jude, sans se livrer — et parce que Jude est tout à la fois conquérant et maudit — est jubilatoire.
Sans surprise, la toute dernière saveur, celle du dernier quartier, de l’écran noir, a le goût du manque, du regret, de l'angoisse : l'amertume des (très) bons films.