Jeanne Moreau, ses plans culs, son égoïsme et le reste du monde
Je ne connais que très peu l'œuvre de François Truffaut et si les 400 coups m'a véritablement emballé, l'homme qui aimait les femmes a été un grande déception. Et quand tout le monde m'a parlé de Jules et Jim, du talent d'actrice de Jeanne Moreau, de cette histoire d'amour pas comme les autres, j'ai tout de suite crié victoire. Trop vite peut-être. Car on est bien au delà de la déception et finalement, il est clair que ce film n'a pas sa place dans le meilleur de la Nouvelle Vague. Film culte devenu nanar improbable, j'en ressors avec une impression de dégoût pour le réalisateur, c'est dommage.
Car le film ne vaut pas plus de 3/10. Pourquoi ? Pour trois points plutôt ingénieux comme la scène des vélos qui illustre à elle seule le vrai propos du film, intelligente et qui aurait pu aider à raccourcir le film d'une heure environ : Jeanne Moreau la première, poursuivie par ses deux amants, amis mais dont on devine que l'un s'efface derrière l'autre : Jim a tous les atouts pour plaire à la belle quand Jules s'est résigné à la laisser à son meilleur ami, préférant ainsi la garder auprès d'elle plutôt que de la voir partir pour toujours. Une scène émouvante et très bien construite, qui nous aide à ressentir les choses. Seulement, elle ne peut contrebalancer à elle seule un film entier qui nous apprend que l'essor de la femme, sa liberté, c'est se foutre de ceux qui l'aiment en allant coucher ailleurs, de changer d'avis d'un jour sur l'autre et d'obtenir par tous les moyens (je fais référence à un final qu'on attendait depuis longtemps mais dont je ne dirai rien, je ne voudrais pas spoiler) ce qu'elle veut sans prendre garde aux attentes, aux sentiments d'autrui.
Le deuxième point revient à la scène des fous du village, véritable bonheur dans le couple à trois autour de la petite fille qui est resplendissante et qui permet d'avoir un petit rayon de soleil dans une histoire morne, comme un de ces jours de pluie où on n'a rien à faire, froid aux pieds et que même à l'intérieur d'un chez soi douillet, on ressent l'immonde atmosphère humide et pesante. Enfin, un troisième petit point pour la blague sur les lecteurs du Figaro qui n'ont pas d'humour.
Tout le reste n'est que perte de temps, caricature et surtout surestime de soi. Car François Truffaut a été capable de me faire rêver, de m'attendrir face au sort qui était réservé aux garçons des 400 coups, à leurs escapades, leurs petites aventures, leurs vies. Il a su interpréter avec justesse une jeunesse qui s'ennuie, qui cherche l'aventure et qui rêve d'un autre monde que le train train quotidien imposé par l'école. Ici, il ne fait qu'additionner les effets visuels pour montrer à quel point il est original (ben oui, c'est la Nouvelle Vague quand même), qu'il sait mettre en scène et faire du cinéma. Seulement voilà, la complaisance dans un style un peu trop lourd à mon goût et une histoire creuse, ça donne un mauvais film, qu'importe le nom, qu'importe l'objectif : l'idée était pourtant bonne au départ mais le réalisateur auteur s'est perdu dans le fil d'une histoire inintéressante. Car, s'il a toujours voulu adapter le livre à l'origine du film, l'histoire n'en reste pas moins dénuée de tout intérêt, tant on s'ennuie à suivre les péripéties d'un couple à trois auquel on ne croit pas : on se demande ce qu'il trouve à Jeanne Moreau, Jules et Jim. Si bien qu'on est plus intéressé par leur amitié que par cette garce qui se joue d'eux.
Dernier point qu'il est important de souligner : le jeu des acteurs. Quand on voit ce qu'ont fait des enfants d'une dizaine d'années dans les 400 coups, on est bien en peine de trouver un quelconque talent au jeu de ces adultes et surtout à celui de Jeanne Moreau qui est tout le temps dans l'excessif, dans le théâtral. Non pas que je n'aime pas le style, mais couplé à une mise en scène prétentieuse et un mauvais scénario, je trouve ça irritant et même agaçant au plus haut point. Il faudra que je vois dans d'autres films si l'actrice vaut vraiment tout ce que l'on dit d'elle.
Bref, à éviter pour la grande déception d'un film devenu culte on ne sait pas trop pourquoi. Quoiqu'il en soit, j'y regarderai à deux fois concernant le choix de mon prochain Truffaut, avant de m'en faire une idée trop bonne.