Jules et Jim, Jim et Jules, Jules et Catherine, Jim et Catherine, Catherine et Albert, Catherine et les autres, Catherine, Jules et Sabine, Jim et Gilberte... Ca en fait du monde tout ça! De quoi s'emmêler les pinceaux. Ce film est un chef-d'oeuvre de la nouvelle vague, un bijou de François Truffaut. Du moins c'est ce qu'on m'a toujours dit. La nouvelle vague, j'ai essayé, certains films sont passés, d'autres me laissent un arrière-goût de "Et alors?". J'ai du mal avec l'intonation plate, le "non-jeu" de certains acteurs de ce courant. Quant à Truffaut, j'avais aimé Les 400 coups, et apprécié Adele H, si j'avais moins accroché avec L'Homme qui aimait les femmes. Je pensais donc que le chef-d'oeuvre tant acclamé allait me gagner définitivement à la cause Truffaut.
Seulement ici aussi on retrouve cette manie de balancer son texte sans le jouer. Le placide Henri Serre n'a jamais vraiment l'air ému, ni en colère, ni... Il n'a l'air de rien en fait. Jeanne Moreau est effectivement tout à fait charmante, mais quand elle demande à son Jules si il les a entendu se disputer, j'ai envie de lui répondre qu'il n'aurait pas pu, étant donné que le ton ne change pas, dispute ou embrassade. Seul Jules, quoi que fort placide également, sonne juste tout du long, puisque ça colle avec son personnage.
Le ton n'est pas la seule chose qui m'a dérangé. Je vais passer pour une chienne de garde mais je trouve que le film a des tendances misogynes. Je sais qu'on parle ici de l'émancipation de la femme qui cherche l'amour où elle le veut quand elle le veut, mais je trouve que nous sommes plutôt face à une dénonciation de ce genre de comportement. Catherine n'est pas heureuse. Elle détruit les hommes sur son passage, se détruit elle même, entraîne les hommes vers leur perte. Quand elle s'en va avec un autre, laissant Jules seul à la maison, où amenant Jim chez eux, je ne trouve pas qu'on soit poussé à avoir de la compassion pour elle, qui se débat avec un mode de fonctionnement qui ne lui convient pas. C'est plutôt pour Jules, qui reste malgré tout, et qui est prêt à tout pour la garder, qu'on compatit. Par contre, quand Jim, coureur de jupons invétéré et assumé, laisse sa pauvre Gilberte se ronger de jalousie, attendre qu'il se décide à revenir, c'est avec lui qu'on nous propose de sympathiser : le pauvre, il a mal à sa conscience de la laisser toute seule à Paris et Catherine n'est qu'une égoïste qui ne fait même pas l'effort de lui faire un enfant. Quant aux deux autres personnages féminins que nous croiserons, nous auront droit à deux clichés opposés : l'incorrigible bavarde et la muette "creuse" qui n'est là que pour "de la baise pure". Pour moi ce qui arrive à Jules, et à Jim, est un écho à la phrase qu'il dit en début de film à la sortie du théâtre : " La fidélité de la femme est la condition sine qua none de la solidité d'un couple. Celle de l'homme est secondaire." Loin de démontrer l'inverse, le film tend à prouver que quand la femme est volage, c'est destructeur, alors que pour l'homme ce serait normal.
Pourquoi alors avoir mis 6? Parce que malgré tout il y a de beaux moments dans ce film. La chanson de Moreau, toute la première partie, la ballade à vélo, les passages avec Sabine... Ce sont les passages où les personnages ont l'air heureux qui m'ont touchées.