On a su pardonner à Pedro Almodovar d’avoir réalisé une œuvre, plus pour retrouver tous ses amis, que pour le public en 2013. Car jusqu’à présent, le plus grand cinéaste espagnol n’avait fait aucun faux pas. Trois ans plus tard, il revient avec Julieta, nommé en compétition officielle à Cannes 2016. Nous retrouvons ici tout ce qui nous séduit chez Pedro, c’est-à-dire les couleurs, les musiques, la tonalité des voix, les flash-backs, les sentiments qui se décuples, mais surtout, la place et la mise en abyme d’une ou plusieurs femmes. Le cinéaste parle souvent des mères et s’il l’avait fait superbement dans Tout sur ma Mère, il propose ici une œuvre moins poignante et originale. En naviguant dans le temps et en changeant d’actrice pour interpréter le même rôle à travers les âges, Julieta nous laisse moins de temps pour nous attacher et être pris d’émotion face à cette femme qui n’a pas vu sa fille depuis plus de douze ans. Pourtant la construction de l’histoire est ingénieuse et se sert d’éléments anodins, comme une statue ou une photo arrachée, pour nous aider à replacer le contexte. Ambiance très sobre, le film ne se sert que de Rossy De Palma pour nous faire sourire jusqu’aux oreilles. Julieta est un film sur l’absence à travers les années. On comprend alors pourquoi la mise en scène est froide. Mais plus cette distance est assumée, moins les blessures de Julieta nous touche.