Juno est VRAIMENT trop écrit. Derrière chaque scène, chaque tirade balancée par Ellen Page — trop belle pour son personnage de marginale déclassée par sa maturité aussi précoce qu'ambiguë —, on sent l'ombre de scénaristes/dialoguistes de 35 ans. La gamine de 16 ans te parle de rock des 70ies, nous la joue "non mais attends, le vrai maître de l'horreur c'est Argento période Suspiria" et autres non-débats pop nerdish au possible, déjà complètement poseurs quand nous, les vrais trentenaires, nous y abaissons. C'est épuisant tellement ça te maintient à distance. Cette répartie anti-naturelle que l'on qualifiera péjorativement de Dawson-Sundancienne agace jusqu'au bout. Et nique complètement la crédibilité du final. Sans déconner, comment une meuf aussi extralucide et radicale peut s'amouracher d'un éphèbe translucide tel que Michael Cera ? « Le cœur a ses raisons que la raison... », ouais ouais : c'est surtout que les scénaristes ont été incapables de savoir comment façonner cet impossible personnage. Alors ils l'ont laissé flotter telle une coquille vide, réceptacle de tous tes fantasmes (« mais si regarde, en fait c'est un musicien très sensible et profond, c'est ça qui plaît à Juno »).
Heureusement qu'il y a les autres seconds rôles, eux aussi ambigus mais surtout touchants : les parents de Juno, le jeune couple gris (mention à la Jennifer Garner désespérée).
C'est eux qui font que l'on est touché par la fin. Sûrement parce que ce film artificiel fait apparaître la ligne désormais troublée de l'adolescent/adulte. On a envie de se pencher au-dessus de la couveuse et de murmurer : « Bon courage, petit gars. »