(critique avec spoil)
Commençons par les présentations, je suis un gros fan des Wachos, mais un très gros fan (aimant les suites Matrix - dont Reloaded dans mon top 10- et Speed racer - aussi dans le top-, j'adore bien sur Cloud Atlas et j'avoue ne pas avoir vu Bound).
J'attendais avec impatiente donc ce Jupiter Ascending, étant du genre à frétiller dès que l'espace est mis à l'honneur dans les films (mon péché mignon) vous vous doutez bien que le premier trailer m'a mis dans tout mes états.
Cependant, le résultat est loin des attentes que j'avais, non pas que je voulais que le film soit d'une certaine manière mais que je pensais qu'il le soit, je m'explique.
Avec ce film, je m'attendais à une formule type Speed Racer aka scénario volontairement débile (donc assumé) avec le véritable travail mis sur l'esthétique et la structure du film. Ce que j'adore dans Speed Racer, au delà du trip visuel style "on adore ou on déteste" c'est bien la structure du film et l'interaction fond/forme ou comment l'intrigue est raconté en fonction de ce qui est montré. Bref, là n'étant pas le sujet j'en reviens à Jupiter, je pensais que le film allait être peu ou prou de la même facture, cad un scénar convenu et assumé mais dont l'intelligence du film se reposerait donc sur la structure et l'esthétisme.
Mais c'est pas le cas, le film se veut un scénar, se veut une histoire, et bien que l'esthétisme soit au rendez vous, la forme n'a ici pas de fonction narrative. Et c'est là que le film m'a surpris, ni en bien ni en mal d'ailleurs (du moins en théorie).
Le film est donc extrêmement imparfait, je l'appellerai même schizophrène (mais j'y reviendrai plus tard).
Pour moi, une extrème majorité des défauts viennent d'une seule et même explication, le format.
Ce putain de format est juste inadapté.
Imaginez la trilogie Star Wars en un film ? Imaginez la trilogie LOTR en un seul film ? Imaginez la trilogie Matrix en un seul film ? Imaginez n'importe quelle trilogie de cette envergure compréssé en un seul film de 2h05.
Ben ça donnerait Jupiter Ascending (la légende raconte qu'il existe un titre en français d'ailleurs ...), cad un résultat ultra ambitieux mais complètement compressé, aux personnages pas/peu profonds, aux péripéties précipités et aux schémas EXTRÊMEMENT répétitif (Jupiter se fait enlevé par un des Abrasax, on la baratine/manipule après lui avoir mis une robe, Caine s'infiltre, la sauve, lui explique en quoi l'Abrasax en question est un fils de pute (ce qui fait que Jupiter soit une pute alors ...) et repart avec elle en tuant des mecs au passage). Jupiter Ascending c'est un problème, celui de vouloir mettre trop de choses dans un récipient trop petit.
Donc forcément le film coupe et tranche rendu le tout absolument instable, il y a un trop plein d'informations, un rythme trop rapide excluant le spectateur. En 20 minutes on passe de Jupiter qui nettoie des WC à Jupiter reine de l'univers, enlevés puis échappé puis re enlevé puis marié puis sauvé le tout sous couvert de ré incarnation, d'immortalité et de génocide de masse. Perso ça coupe toute empathie, je ne peux pas rentrer complètement dans l'univers du film si on me laisse pas me poser un minimum, me laisser imprégner de l'ambiance et du ton du film (ce que faisait admirablement Matrix), me laisser digérer les infos pour mieux les ressentir. Cloud Atlas avait la particularité d'avoir 6 ambiances totalement différentes, facilitant l'immersion, vu qu'on a plusieurs points de repères qui s'alternent suffisamment pour ne pas se lasser, pour bien comprendre les tenants et aboutissants, mais suffisamment présents pour que ça ne devienne pas anecdotique <-- merci le montage du feu de dieu btw.
C'est pas tant le scénar le soucis mais son traitement, sa putain de narration. Pas besoin d'avoir un scénar de ouf pour faire un film de ouf, prenez Fight Club par exemple, si sur le papier c'est cool mais c'est pas dingue non plus, pourtant c'est son traitement qui rend le tout géniallissime. Pareil pour Pulp Fiction et pleins d'autres grands films ...
Non, je suis certains que le scénar "papier" de Jupiter aurait pu permettre un Chef d'oeuvre si le traitement narratif avait été à la hauteur, et bâcler son scénar en y allant à toute allure n'est pas un bon traitement narratif.
Et pour moi, de là découle tout les soucis importants du film, les thématiques énoncés mais pas en profondeur, la réincarnation est résumé en un ctrlc ctrlv de l'adn, la critique capitaliste à un génocide égoiste (c'est con, l'idée de la moisson aurait pu donner une envergure de ouf à la critique capitaliste vu que pour le coup ça dépasserai l'échelle même de notre planète), le conte est réduit à seulement un déroulement narratif répétitif style "belle en danger" et quelques name dropping de contes existants, la perception des Extras Terrestre par les terriens est résumé en "LOL LES CROP CIRCLE DANS LES CHAMPS" et puis le pire reste surement l’extrême ressemblance des péripéties ...
Y passe alors la personnalité des méchants, on sent l'effort qui est fait pour tenter de leur donner du cachet et de la profondeur mais ça passe pas, quand un personnage est unilatéral, il n'est pas profond (et c'est pour ça que Frodon me gonfle :D), il peut être intéressant sa maniaquerie sert le film en le haussant vers le haut (style Joker dans Dark Knight) mais c'est pas le cas du film, la fille jeune et belle veut juste rester jeune et belle et les deux frères veulent juste la même chose mais l'un est "subtil" et l'autre bourrin, l'univers (espace + planètes), si superbe à voir n'apporte au final rien de concret (à part la superbe scène administrative qui m'a bien fait marrer mais malheureusement un peu HS avec le ton sombre et sérieux du film <-- mais fun quand même o/).
Point d'honneur au bad guy et son cabotinage qui n'aide juste pas du tout (et en plus la voix fr qu'ils lui ont donnés ... diantre quelle horreur cette voix ...). Et puis cette romance, désolé les Wahos mais là, c'est clairement de la paresse cette love story, d’habitude j’adore les histoires d'amour dans leurs films (Neo/Trinity, Sixmith/Frobisher) mais là c'est juste niais et nul, mais bon, c'est pas non plus catastrophique vu que la love story est souvent traité avec humour et ne prend pas trop de place à la fin, mais bon ...
Bref je vais pas lister jusqu'à demain, vous avez compris que pour moi le problème qui nique tout le film c'est le format donc la narration, c'est mettre un moteur de 2 chevaux dans une carrosserie Ferrari, le film ne peut pas se donner les moyens de s'assumer.
Mais j'en veux pas aux Wachos, peut être que c'est mon statut de fan mais j'ai la profonde certitude que c'est la boite de production qui a chié dans la colle, repoussé de 8 putains de mois (Oo), une promo quasi inexistante (il m'aura fallu attendre la veille de la sortie du film pour commencer à en entendre parler), il me semble même que les wachos voulaient partir sur une trilogie (<-- /!\ aucune source fiable, j'ai ça en tête mais infoutue de me rappeler d'où je tire ça /!\). On peut reprocher des choses au tandem, mais pas celui d'être ambitieux, de vouloir aller loin, et voir une telle aberration de format me semble incompatible avec les deux réals. Au départ ils voulaient faire une trilogie V pour Vendetta (ils ont même pensé le scénar initial comme tel), mais quand ils ont eu la permission que d'un film, ils ont re écrit le scénar et déléguer la réal à leur assistant réalisateur. De ce fait, je les vois mal, eux même, faire un one shot Jupiter Ascending de seulement 2 heures avec une telle ambition.
La fin me semble assez ambiguë d'ailleurs, si elle se suffit à elle même, il reste néanmoins pleins d'intrigues qui ne sont pas traités, le film peut être suivis mais peut ne pas l'être, au box office de dicter la suite si je comprend bien, peut être que si le film remplis les salles alors les Wachos auront carte blanche pour la suite (???). J'en sais absolument rien du tout, mais quelque chose pue dans toussa.
Car au tout début de ma critique je parlais de film Schizophrène, et en effet, si le film a un rythme 1000 fois trop rapide/indigeste il n'empêche qu'il est juste sublime visuellement, que ça soit la mise en scène de l'action (moins porté sur le corps à corps d'ailleurs), la variété des décors tous majestueux, la qualité des détails, des fourmillements, le design des vaisseaux, des armes, la représentation de la nature, les avancés technologiques, les costumes, le maquillage, le bestiaire ... ce PUTAIN de background est vertigineux, le film se permet de rester à la surface des choses tout en proposant un univers visuellement aboutie comme rarement j'ai pu en voir, à ce seul niveau là, ce film poutrasse la tronche à Star Wars/Trek, gardiens de la galaxie et alors je parle même pas d'hunger games et autre Divergeante. Le film m'a bluffé à ce niveau là et rend le grand écart encore plus dur à appréhender, les mecs te créer un putain d'univers mais avec une histoire trop vite (et mal) racontée ...
Mais le film a des qualités, je parlais du background, mais pas que, les scènes d'action "made in Wachowski" renvoient les autres films à l'école tout comme les effets spéciaux, cette course poursuite au début du film est haletante (et m'a rappelé un certain Reloaded ^^), la musique est de très bonne facture aussi.
Il y a quelque chose que j'ai bien aimé c'est les réactions détachés de Jupiter, si son côté "je crois le dernier qui a parlé et je tombe dans tout les pièges et ma seule utilité est de n'être qu'une pauvre princesse qui a besoin d'être sauvé" est très vite chiant, son côté "à l'aise Blaise" m'a bien amusé, on ne tombe pas dans l'archétype du héro banal qui se découvre et qui devient une brutasse (Neo par exemple), Jupiter est et reste une pauvre humaine qui n'a rien demandé et qui veut juste retourner chez elle, elle fait ce qu'elle peut (même si elle le fait mal !), ça casse gentiment le petit mythe du héro anonyme, du coup j'avais de la sympathie pour cette Jupiter. Son côté banal assumé aurait pu être cool si cela ne devenait pas juste un jolie bout de viande que le beau et fort Caine se doit de sauver tout le temps.
La 3D est une merveille aussi, on n'évite pas la petite lourdeur pour les yeux (mais le film n'y peut rien à ça), elle se fait sentir, elle accroche l'oeuil sans nuire à la lisibilité des scènes et sublime encore plus les décors, bref la 3D tire le film vers le haut (comme devrait le faire toutes les 3D ... mais bon).
Que dire au final de ce film ?
Décevant c'est le mot.
Mais pour des raisons un peu spéciales tout de même, vous l'avez compris, pour moi c'est un problème de format, pas d'histoire. Le film reste néanmoins honnête et est un chef d’œuvre visuel (oui je le dis, je rappelle que je suis un fan boy Wachowski !). Le film est dans une sorte d'entre deux chaises terriblement fatal, comme un unique coup qui engendre de gros dégâts.
J'espère qu'il y aura une suite, mais à l'unique condition (ouais je pose des conditions, je suis un mec comme ça moi) que le film prenne son temps et traite correctement tout le background qu'il met en place, c'est une fois que tout les points (importants) montrés à l'écran seront correctement traités (et ça commence par les personnages) que le film emploiera son plein potentiel, et du potentiel mes amis, Jupiter Ascending en a !
Avoir de l'ambition c'est bien, mettre en image son ambition c'est encore mieux, traiter et donner de l'importance à son ambition c'est ultime et le tout marchera pleinement uniquement à ce moment là. La trilogie Matrix a réussi sur ces trois points, Jupiter a chié dans la colle sur le troisième ...