Malgré ses défauts ostentatoires, je n'arrive pas détester la dernière production des Wachowskis. A l'instar d'un Del Toro ou d'un Terry Gilliam, le duo imprègne son film de tant de sa personnalité et de son imaginaire que le voyage, même chaotique, reste enchanteur.


On retrouve les thèmes chers aux cinéastes déjà soulevés, surtout, dans Matrix. L'ascension d'un novice au rang d'élu, un capitalisme forcené exploitant une masse pour une poignée de nantis, une mythologie empruntée au panthéon grec (et aussi à la bible et au bouddhisme). Les frangin(e)s ratissent large et bouffent à tous les râteliers. L'univers développé est d'une richesse étourdissante voire étouffante tant ses références son nombreuse. Il devient alors évident que tisser des intrigues avec une telle somme de personnages, de factions et d'idées en seulement deux heures va relever de la gageure. Et en effet, on sent rapidement que vouloir traiter tout ce petit monde va voir un cout : la superficialité. Rien n'aura de profondeur, tout sera esquissé. Les enjeux politiques, les querelles familiales, les amourettes bancales, les trahisons formatées, un embrouillamini indigeste qui ne tient que par la cohérence plastique de l'édifice.


Œuvre baroque vertigineuse, Jupiter Ascending est une cathédrale de lumière avec des fondations en carton. La direction artistique est réellement le personnage principal du film. Même si certains choix s'avèrent douteux comme le look général de plusieurs personnages d'arrière plan, l'ensemble baigne dans une sorte de cohérence hallucinatoire qui pioche ses références dans un grand fourre-tout mythico-culturel. Certains plans dans l'espace sont d'une beauté sidérante à l'image de ce vaisseau aiguisé qui transperce une nappe d'astéroïdes. Il se dégage une grande cohérence technique de cet univers avec des technologies, fantasmées certes, mais s'inscrivant toujours dans une logique inspirée. Les personnages principaux sont des archétypes simplement voués à faire progresser une histoire qui manque évidement de tension, de surprise et d'émotion. Pourtant habitués aux scènes d'action virevoltantes, les W-Bros accouchent de séquences assez brouillonnes (Tatum en skyrollers, un final pyrotechnique confus), illisibles (Tatum et Bean à l'assaut dans leurs Archange Suit) ou simplement (vidéo) ludique (Tatum vs Grôlézar round 1. Fight !).


On peut regretter, qu'à l'époque, Matrix ait engendré deux suites car il n'y avait finalement pas matière à ça. Avec Jupiter Ascending il y avait largement de quoi modeler une trilogie de l'ampleur d'un star Wars et autres Seigneur des anneaux. La logique des studios et leur vision étriquée du profit à court terme ont produit une œuvre amputée dès sa conception. Honte à eux qui enfilent à la chaine les productions sans âme ( Marvel, Transformers, pirates des caraibes) et qui étouffent le moindre élan de création, d'originalité et de risque.


Les wachowski se lancent dans une série tv ? Tant mieux, ce format devrait mieux convenir à leur créativité débordante.

Alyson Jensen

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