La désormais tragique franchise Jurassic tient une place un peu à part dans mon mausolée à blockbusters. C’est peut-être la dernière qui arrive encore à titiller la fibre enfantine qu’ont définitivement fini de détisser les histoires standardisées de super-héros, les récits niaiseux d’Heroic Fantasy ou les cahier-des-chargisés chroniques de loners vengeurs et taiseux.
Même papy Spielby est arrivé à radicalement dévitaliser les archéologues aventuriers sur le retour.
Dinosaur junior
Dans un Jurassic, il y aura toujours cette corde qui vibre: des bestioles de plusieurs tonnes y rôdent, et si je ne peux évidemment pas rivaliser avec notre ami Zombiraptor (le plus grand malade officiel de ce site) sur le sujet, les dinosaures ont bien fait partie (comme tant de millions d’autres, générations après générations) de mon usine à rêve de gosse.
Cher, laid, est dino
Dévoilons dès à présent le fond de l’affaire: il n’y a rien d’autre dans Jurassic world que ce plaisir primaire. Aucun élément entourant nos chères bébêtes ne vient relever le niveau. Ni le scénario, ni l’écriture des personnages, ni les acteurs ni la réalisation, ni les effets spéciaux ne viendront au secours de la franchise. On ne rit pas (ou en tout cas pas quand semblent l’avoir voulu les scénaristes), on a pas peur (sauf quand on imagine soudain la scène suivante), on n’est pas étonné (sauf par la bêtise d’un dialogue), on est jamais tendu (sauf quand on réalise que le voisin met 1h45 à finir son paquet de bonbon).
Le tout est tellement téléphoné qu’on semble parfois naviguer vers une autre œuvre du géniteur-réalisateur: E.T. Rex téléphone maison. Chaque demie bonne idée (l'Indominus qui communique, le Raptor qui rencontre une roquette) est immédiatement battu en brèche par deux mauvaises.
Deus Rex Machina
Et quand je parle des bestioles, même là il ne faut pas se montrer exigeant.
Ces monstres gentils (dont le principal, mix étrange de 45 espèces, au bas chiffre) font exactement ce qu’il faut pour que le film respire selon les désirs des scénaristes: ils apparaissent, disparaissent, changent de camp, font demi-tour, émergent, volent, courent exactement selon le tempo hollywoodien. Ce qui permet à nos héros de dérouler le tapis (que dis-je, la moquette) complet des clichés inutiles mais incontournables.
Avec une galerie de personnages marquants et inoubliables: Claire, héroïne cloné à base de Jessica Chastain et de crapaud de la Taïga (pour combler les trous de l’ADN manquants), Owen, l’homme qui murmurait à l’oreille des Raptors, Hoskins méchant diabolique qui aurait eu sa place dans un nouveau Austin Powers, et les enfants Gray surdoué-mais-triste-parce-ses-parents, qui-n’ont-jamais-visité-le-parc-alors-que-la-sœur-de-maman-le-dirige-depuis-des-années, divorceront-peut-être, un-jour, mais-en-fait-on-s’en-fout, c’était-juste-pour-une-scène-d’émotion et enfin et surtout Zach, post ado priapique dépressif sauf-à-l’heure-de-retrouver-les-joies-de-la-vraie-fraternité-revitalisée-par-une-bonne-réparation-de-Jeep-en-milieu-humide.
Mais le plus important n’est bien entendu pas là, car assez rapidement, une question cruciale se pose.
L’héroïne conduit un camion pendant une bonne dizaine de minute du long-métrage.
Cela en fait-il un film féministe ?