Il est indéniable que la saga Jurassic Park a laissé une empreinte indélébile sur l'imaginaire collectif. Profitant de la vague déferlante des reboots/suites/hommages de sagas cultes, voilà, presque quinze ans après le troisième volet, que débarque un nouveau long métrage estampillé "Jurassic", se débarrassant au passage du mot "Park" pour adopter le nom "World", histoire d'afficher sa déférence à l'oeuvre originale, tout en s'en démarquant pour afficher son côté bigger, louder... Better ?
Le spectacle proposé remplit son contrat haut la main question "bigger". Plus nombreux, plus gros, intervenants plus fréquemment, les dinosaures sont de presque tous les plans, animés par des effets spéciaux de qualité, tant animatroniques qu'issus des images de synthèse. Colin Trevorrow, d'humeur généreuse, offre au public ce qu'il est venu chercher et n'hésite pas à montrer plein écran la mort violente réservée à certaines des victimes des sauriens en folie. Les situations sont variées et le sentiment d'urgence et de danger est accentué par la présence des touristes, puisque le Park... Non, pardon, le World, est exploité et en constant développement. Trevorrow en profite pour glisser une critique simpliste du gros capitalisme pas bien aux commandes, assez dispensable. Le discours sur l'influence néfaste de l'homme sur la nature, la sélection naturelle ou la place de l'humain dans son environnement est déjà plus pertinent, même s'il s'avère être un classique de la saga. Quant au rythme affiché, il s'avère trépidant et, passé une introduction familiale des plus classiques, plongera son public au coeur de l'action que le film propose sans jamais faiblir, au point de douter que la visite dure plus de cent vingt minutes.
Le film est pour sûr un agréable divertissement, mais il se condamne lui même dans son aspect "better" puisqu'il oscille constamment entre le ride de parc d'attractions et l'hommage aux films matriciels de l'ami Spielberg. Remplacez par exemple le gyroscope par une jeep et vous aurez à la péripétie près le remake de la scène ultra célèbre du premier épisode. Remplacez une scène de mort d'un des dinosaures par une scène de soin... Ou encore l'intervention des mercenaires tout droit issue du deuxième opus.
Si les scénaristes ont repris l'idée pas mauvaise de la communication entre raptors, le fait de faire partager cette capacité avec une autre espèce noie toute idée de vraisemblance, avec ces sales bestioles pas reconnaissantes qui changent sans arrêt de mâle alpha selon le degré de danger et le souvenir plus ou moins preignant de la main qui les a nourris. Certains autres arguments, s'ils ne sont pas mauvais dans le cadre d'un Jurassic Park, se révèlent timides, à l'image de la seule attaque de ptéranodons dont seront victimes les touristes, ou amènent l'oeuvre à faire de l'oeil au concept de certaines productions Asylum fauchées d'affrontements de monstres tueurs. Cependant, le final est très bien fait et plaira au public bourrin, d'autant qu'il n'y a, une fois de plus, rien à redire au niveau de la mise en scène ou des effets spéciaux impeccables.
Du côté des acteurs, la présence en pointillés du gentil Omar Sy, dont la campagne marketing française use et abuse, est toute relative puisqu'il n'apparaît qu'à peine quinze minutes à l'écran pour réciter une page de texte. Le style business woman de la ravissante Bryce Dallas Howard ne lui va pas trop au teint. Heureusement qu'elle l'abandonne assez rapidement et qu'elle se révèle être une femme d'action assez honorable. Chris Pratt, lui, s'il ne démérite pas, semble en pilote automatique et tout droit sorti d'une publicité Pedigree Pal spécial Raptors diffusée entre cinq minutes de programme pour ménagère au cerveau vide made in service public. Mais sa cool attitude emporte néanmoins le morceau et fait que l'on passe un bon moment, à l'image d'un film hybride comme les dinosaures qu'il met en scène.
Ride agréable et parfois spectaculaire payant son tribut à son illustre aîné, sans pour autant réussir à sortir de son ombre écrasante, Jurassic World se révèle être une bonne série B, ni plus, ni moins.
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