Malgré une admirable volonté d'éviter les clichés, les rôles sont, en raison de ce que l’on sait des violences conjugales en France, clairement distribués d’entrée de jeu, faisant immédiatement peser sur le spectateur une angoissante chape de plomb.
En effet, dès les premières minutes du film, la tension nous saisit pour ne plus nous lâcher, si forte qu'on pourrait presque la fendre au coupe-coupe. La mise en scène de Xavier Legrand, minutée et réaliste, y est pour beaucoup, notamment grâce à des plans serrés créant une sensation d'oppression qui atteint son paroxysme lors d'un final étouffant qu’on n’est pas près d'oublier.
La scène de la soirée à la salle des fêtes est à ce titre un modèle de thriller psychologique, l'étouffement des dialogues et l'apparente banalité du moment permettant d'installer une véritable anxiété avec l'aide des acteurs.
Si Léa Drucker impressionne dans son rôle de mère faisant face au danger avec toute la dignité du monde, c'est Denis Ménochet qui marque les esprits. Son physique d'ogre et son interprétation tout en sobriété, renforcent progressivement la menace que représente son personnage, pourtant non dénué d'humanité et de fragilité, en particulier dans les scènes où il donne la réplique au jeune Thomas Gioria, très touchant dans le rôle de ce gosse rongé par l'angoisse tentant tant bien que mal de tenir tête à son père pour protéger sa mère.
Par sa simplicité et son refus d’un spectaculaire putassier Jusqu’à la garde est une saisissante chronique de la violence conjugale, un vrai film important.