Version 1 :
Pour toutes les femmes qui meurent sous les coups de leur compagnon. Pour tous les enfants brisés par des parents violents ou des divorces destructeurs... Non, je ne vais pas faire semblant.
Version 1 avortée.
Version 2 :
Jusqu'à la garde est un excellent premier film servi par des acteurs qui excellent eux aussi et une réalisation opérant une montée en tension admirable aboutissant à un final abasourdissant.
Version 2 ou version courte, fin.
Voici la longue : version 3 de la critique.
Ce film refuse le manichéisme habituel que le sujet pouvait laisser entendre et parvient à créer des moments de tension extrême à l'aide d'artifice discret mais redoutablement efficaces. A partir de cadrages intelligent et d'un montage qui arrive à transformer le quotidien en une épreuve de chaque instants, Jusqu'à la garde s'impose non seulement comme une réussite formelle mais également comme un œuvre qui m'a personnellement happée.
La figure patibulaire et imposante de Denis Menochet est ici exploitée, progressivement pour en tirer le plus malsain, le plus effrayant et prouver, s'il le fallait, que cet acteur est décidément très talentueux. Denis Menochet, dans le rôle de l'autre, dont on sent à tout moments qu'il peut basculer vers une violence déraisonné et imprévisible est bluffant non seulement pour sa prestation en elle-même, mais également pour son personnage et le traitement de celui-ci qui en est fait.
Exemple ? Exemple.
La rigueur du cadre.
En voiture, quand le père impose de sa stature face à son fils, aucun des deux n'est cadré en entier dans un même plan. La réunion des deux s'effectue par l'appel de la mère, liant père et fils. Appel symbolisant à la fois l'espoir de l'enfant et l'emprise de l'autre. On se retrouve alors cloisonné, enfermé dans ce cadre, où les rapports de force sont évidents et préfigurent la suite des évènements. C'est simple en apparence mais extrêmement efficace.
La guerre psychologique n'est pas relayée au second plan. Celle du harcèlement, celle où, quand on déjeune avec son fils et son petit fils, on démarre au quart de tout car on sait que la violence est en constante somnolence, prête à se réveiller à la moindre occasion.
Cette guerre psychologique, elle passe par un récit qui a l'intelligence de ne pas nous donner de réponse dans la scène d'exposition.
C'est à travers cette quête de vérité que le spectateur va être acteur. Bien malin celui qui peut prendre parti de manière définitive dès la première scène. Une scène qui, à grand coup de dialogues et de cadrage inclusifs - ou exclusifs-, pose les bases d'un rapport conflictuel. Une scène où les protagonistes ne peuvent parler que brièvement en leur nom, où toute l'affaire semble paradoxalement désincarnée, déshumanisée, où le doute est roi, où chaque camp veut avoir le dernier mot.
En mettant en évidence l'horreur du quotidien où, quand on fuit les appels incessants de l'autre, on le retrouve devant le portail de la maison, où quand on pense être rassuré, retenti un coup de fusil, Jusqu'à la carde capte.
Ce film est subtil et intelligent dans son écriture. Jusqu'à la garde refuse le tire-larme si facile et livre un thriller psychologique, oserai-je dire un film d'horreur psychologique ?
Tension/10