Ma critique vidéo sur Jusqu'au bout du monde
Quand on apprend que Viggo Mortensen réalise son deuxième long-métrage tout en étant à la musique, il y a de quoi être intrigué. Il avait déjà fait ses preuves avec Falling, un drame de 2020 qui semble plutôt plaire dans la majorité, et il revient cette année avec un western et une romance. Etant un peu intrigué par ce qu’il vaut à la réalisation (en étant un grand fan de l’acteur) et n’ayant pas vu de western au cinéma depuis un long moment (le dernier étant Les Frères Sisters), il y a de quoi tenter le coup. Et, autant le dire, c’est très intéressant dans ce que ça propose.
Positif
- Vivienne Le Coudy (Vicky Krieps) est une jeune femme qui a eu un passé difficile et tente de gagner sa vie par elle-même. Elle a beau avoir un compagnon respecté, elle cherche tout de même à travailler, à s’occuper de leur chez eux, à vivre sa vie en somme, et ça marche. Vivienne est une protagoniste qui est réellement attachante, dont on comprend les actions et qui nous donnent envie de la soutenir. Son passé renforce ses intentions pour les spectateurs et c’est réellement une protagoniste très intéressante à suivre, même par rapport à ce qu’elle va traverser.
- Holger Olsen (Viggo Mortensen) est un homme solitaire qui est tombé amoureux de Vivienne et a décidé de faire sa vie avec elle. On sent que les décisions qu’il prend sont pour mieux aider Vivienne à vivre maintenant qu’ils sont ensemble mais c’est un être qui se veut de plus en plus attachant. On pourrait croire qu’il faut se méfier et qu’il n’a rien à apporter mais plus le long-métrage avance et plus on découvre sa personnalité attachante, surtout envers Vivienne où il est extrêmement bienveillant et contre qui il ne s’énerve jamais. Ce n’est pas l’homme parfait non plus mais on comprend pourquoi Vivienne est amoureuse de lui, en plus de lui apporter la liberté dont elle a toujours rêvé.
- Vincent (Atlas Green) est le fils de Vivienne. On ne va pas raconter comment il est arrivé (même si c’est facile à deviner et que la mise en scène nous le montre bien) mais c’est un garçon innocent qui apprend la vie avec sa maman et tente de mieux connaître Olsen. Il prend de l’importance assez tard dans le récit mais il faut reconnaître qu’il est assez mignon comme enfant.
- Weston Jeffries (Solly McLeod) est un homme vulgaire et sans gêne qui n’hésite pas à se faire craindre de toute la ville, due au fait que son père possède la majorité des bâtiments de la ville et le protège de tout danger, tout en s’intéressant un peu trop à Vivienne. C’est un être détestable pour sa personnalité et ses actions mais c’est un antagoniste qui marche. Il est l’inverse d’Olsen car il se permet tout ce qu’il veut tout en étant un peu fou afin d’obtenir ce qu’il veut, toute la ville montre clairement qu’ils le craignent. Vivienne a beau ne pas se laisser faire, il faut reconnaître qu’il est un antagoniste qui se tient bien.
- Les évolutions se sentent et font assez plaisir à voir. Dans le cas de Vivienne, c’est léger mais son amour pour Olsen, son passé et ce qu’elle va traverser ne va jamais l’empêcher de vouloir sa liberté (pour être heureuse). Sa peur de Weston se comprend vu ce qui s’est passé mais ça ne l’empêche pas de vivre malgré tout. Du coté d’Olsen, c’est un homme qui profite de la vie sans plus mais qui, avec Vivienne, va trouver une raison de vivre et à laquelle s’accrocher, il semble enfin s’inquiéter pour quelqu’un dans sa vie alors qu’il était un grand solitaire.
- Concernant la dichotomie entre Weston et Holger, elle est légère mais elle se base sur Vivienne. L’un la voit comme un objet de désir pour s’amuser alors qu’il est obligé d’obéir à son père pour être protégé (en plus d’être un peu fou), l’autre la voit comme une vraie femme dont il est amoureux pour son caractère tout en ayant une vie libre avec elle. La dichotomie est légère mais elle se sent bien ici.
- La relation amoureuse qui se développe entre Olsen et Vivienne est assez intéressante, notamment dans les envies de liberté de Vivienne et de ce que cette relation apporte à Olsen. On a une relation qui fait bien évoluer les deux personnages dans un sens intéressant. Tout comme la relation entre Olsen et Vincent qui est un peu moins importante mais intéressante.
- Démarrer le long-métrage par la mort d’un certain personnage est une bonne manière de nous donner envie de savoir ce qui s’est passé et de savoir comment cette personne en est arrivé là, même si on a quelques idées. En tout cas, c’est une manière intéressante de commencer le long-métrage.
- Les musiques sont magnifiques. Non, sincèrement, les musiques sont d’une excellente qualité dans toutes les séquences de ce long-métrage tout en fonctionnant à l’image, même à la sublimer. Dire que c’est Viggo Mortensen qui s’est occupé de la musique, c’est réellement magnifique.
- Le symbolisme apporte pas mal d’éléments intéressants. Olsen, Vincent et Weston pour Vivienne, Vincent et Vivienne pour Olsen, son envie de servir le pays et son devoir, l’envie de liberté de Vivienne… Il y a réellement beaucoup d’éléments de symbolisme intéressants à voir ici.
- La fin est assez jolie. C’est comme si Olsen avait atteint un certain point de son voyage tout en étant en raccord avec le titre VF du film. Réellement, c’est une fin efficace pour ce qu’elle propose et par rapport à ce qui est arrivé à une certaine personne.
- Le jeu d’acteur est réellement efficace. Vicky Krieps est réellement excellente, Viggo Mortensen est bon (même si ce n’est pas son meilleur niveau) et Solly McLeod s’en sort bien aussi. Le reste du casting offre également une bonne performance.
- Malgré quelques éléments assez prévisible, on a quelques autres éléments un peu inattendus. C’est surtout le cas au début du film en fait mais ça apporte réellement de l’inattendu qui surprend et qui marche (pour le début en tout cas).
- En terme de mise en scène, c’est de bonne facture. Sans être une mise en scène transcendante, c’est une mise en scène efficace dans ce qu’elle veut raconter dans ses séquences, de quoi apprécier pour ce qu’il propose.
- Les décors sont magnifiques. Quel que soit le lieu qui nous est montré, nous sommes face à des décors d’une très bonne qualité, un vrai régal à voir pour les yeux, que ce soit en intérieur ou extérieur.
- Les costumes sont de très bonne qualité, quel que soit le costume qui nous est montré, on voit bien qu’ils ont été soignés et définissent assez bien chacun des personnages qu’on voit.
Négatif
- La construction du long-métrage est un petit peu problématique. Ils ont décidé de mélanger le passé et le présent à partir de l’introduction mais ça ne marche pas trop. Là où Challengers arrivait à être linéaire dans la narration de part sa structure et l’évolution des personnages et de la situation du passé à travers le match final, là, ça marche moyennement. Des fois, on revient sur une séquence du présent avec Olsen et son fils, ce qui est intéressant mais qui nous sort un peu du passé avant qu’on y retourne, ce qui est regrettable. Il aurait mieux valu garder un récit complètement linéaire du début à la fin pour que ça fonctionne mieux, y compris dans la structure des séquences. C’est ce qu’on pourrait reprocher le plus à ce film vu que ça nous donne l’impression de voir deux films dans un seul film.
- On voit venir certaines ficelles du scénario comme ce que veut l’antagoniste et ce qu’il va finir par faire, quelques conséquences après… C’est peu mais on voit vraiment venir certaines ficelles du scénario et, même si il est bien construit, c’est regrettable. Sans parler du fait que l’introduction nous fait déjà voir la tension en baisse.
- Question émotion, c’est bien géré mais on ne ressent pas grand-chose. Malgré la bonne mise en scène et l’excellente musique, il manque quelque chose pour qu’elle soit réellement efficace pour les spectateurs.
- Question tension, malgré ce qui se passe, c’est difficile d’en ressentir. On a beau s’attacher à Olsen et Vivienne, ce n’est pas simple de ressentir de la tension pour eux, malgré ce que Vivienne va subir…
- Même si la durée passe, il y a des scènes qui font un peu trop longues et c’est assez regrettable. C’est léger mais ça se voit que certaines scènes s’étendent un petit peu trop sur la durée.
!!! PARTIE SPOIL !!!
Pour ceux qui se demandent, la vengeance d’Olsen était là dès qu’il a appris la nouvelle mais il n’a pas agi car Weston s’était déjà enfui ailleurs à cause de ses actions. C’est difficile de croire que, dans les séquences du présent, il ne veut pas se venger de Weston et tombe sur lui par hasard pour le laisser souffrant dans le désert. Enfin, sa mort ne ramènera pas Vivienne et ne rattrapera pas ce qu’il a fait, le laisser pourrir dans le désert était peut-être la meilleure solution en fait. Quant à Vincent, il a beau être le fils biologique de Weston, son vrai père sera et restera sûrement Olsen, sachant qu’il ne saura jamais la vérité sur son père.
Quand Olsen veut s’engager dans l’armée, on sent qu’il ne veut faire ça pour son pays mais aussi pour permettre à Vivienne de mieux vivre. Alors oui, c’est leur coin à eux qui progresse et devient de plus en plus beau avec le temps mais, vu l’amour qu’il lui porte, il doit en partie faire ça pour elle aussi. Quant à Vivienne qui ne veut pas le voir partir, c’est normal, elle a déjà perdu son père à cause d’une guerre et elle ne veut pas que ça se reproduise avec l’homme qu’elle aime, surtout après l’avoir suivie pour vivre avec lui. Ce départ difficile se comprend totalement en se mettant à la place des personnages.
Donc, pour les traducteurs français The dead doesn’t hurt signifie « Jusqu’au bout du monde ». Bon, il est vrai qu’on y retrouve un lien avec la mort donc c’est un petit peu pardonnable et ce n’est pas un gros défaut en soi, mais ça pourra en perturber quelques uns. Mais bon, comme Jusqu’au bout du monde fait du sens avec la fin où Holsen dit que c’est la fin de leur monde mais pas d’autres mondes, dont le monde des morts où doit se trouver Vivienne maintenant, ça fonctionne comme titre au final.
La séquence avec l’homme en armure du début est un peu troublante mais on comprend par la suite qu’il s’agit de Vivienne qui s’imagine être sauvée par un chevalier, le chevalier qu’elle attendait. Tout comme un moment où elle ne le voit plus car elle était toute seule à faire face à ce qui s’est passé avec Weston. Cette séquence est peu présente mais elle a un véritable sens, même si on aurait pas dit non à voir une séquence finale où elle voit Holsen avec son cheval arriver pour la sauver.
Au final, Viggo Mortensen nous offre un nouveau western intéressant et assez surprenant en tant que réalisateur. Sans s’attendre à rien, juste en y allant par curiosité et en étant fan du genre du western, on a de quoi passer un très bon moment en le regardant. On a une bonne mise en scène, des personnages intéressants avec une relation bien développée, des décors de toute beauté, des musiques sublimes et un antagoniste intéressant. Après, il est vrai que le scénario est un peu prévisible, que la construction narrative est discutable et qu’il y a quelques petites longueurs. Mais bon, c’est réellement un western qui vaut le coup si vous êtes fans du genre, en VOST de préférence cette fois (même si vous êtes libres de choisir la version que vous souhaitez).