Après avoir fait la réouverture des cinémas post-covid en 2021 avec Falling, son premier long métrage en tant que réalisateur, Viggo Mortensen remet le couvert avec Jusqu’au bout du monde, un film qu’on pourrait qualifier de western romantique.

Viggo a une carrière en tant qu’acteur que l’on ne présente plus. Avec plus de 60 rôles devant les caméras des plus grands, de Peter Jackson à David Cronenberg en passant par Ron Howard, Ridley Scott ou Gus Van Sant, son désir de réalisation a finalement pris le dessus.

Présent aussi bien comme réalisateur que comme acteur dans Falling, il devait pour ce second long métrage se concentrer uniquement sur le travail de mise en scène. Malheureusement, l’acteur qui devait jouer le personnage d’Holger Olsen (et dont l’identité n’a pas été dévoilée) s’est retiré du projet en dernière minute. C’est presque au pied levé que Viggo Mortensen a donc endossé le costume d’Holger.

Et c’est tant mieux pour nous, car sa prestation est vraiment remarquable. Bien que son rôle soit celui d’un cowboy classique, taiseux au regard perçant, il apporte au personnage une certaine fragilité, une sensibilité peu habituelle pour un western.

Sur le papier, l’intrigue de Jusqu’au bout du monde était plutôt classique. Dans l’Ouest américain des années 1860, Holger Olsen rencontre une jeune canadienne ravissante, Vivienne Le Coudy, dont il tombe amoureux. Le jeune couple s’installe dans un petit paradis reculé, mais rapidement la guerre de Sécession éclate et Holger s’enrôle dans l’armée. En son absence, les choses tournent mal pour Vivienne, qui est agressée par le méchant de notre histoire, Weston Feffries, fils d’un riche propriétaire terrien. A son retour de la guerre, plusieurs années plus tard, Holger Olsen découvre les ravages de Weston sur son couple, et décide de se venger…

Tous les grands motifs du western classique sont là : le duel au pistolet, le saloon crasseux, le maire corrompu, le shérif et son adjoint, et un type en rogne prêt à tout pour se venger.

Pourtant, tout dans la mise en scène prend le contrepied des codes du genre : Jusqu’au bout du monde prend davantage la tournure d’un drame romantique que d’un western. L’histoire d’amour, bientôt contrariée, prend le pas sur l’histoire de la vengeance meurtrière. Du rythme posé du film, presque lent, contemplatif par moments, naît le romanesque.

Qui dit love story dit personnage féminin fort. Vivienne est incarnée par l’éblouissante Vicky Krieps, actrice luxembourgeoise connue pour ses rôles sensibles, comme dans le formidable Serre moi fort de Mathieu Amalric, Phantom Thread de Paul Thomas Anderson, ou plus récemment dans Corsage de Marie Kreutzer. Elle joue parfaitement la jeune femme vulnérable mais dotée d’une forte volonté.

On pourra reprocher au film un certain classicisme, notamment dans sa construction tout en flashbacks. Loin du film d’action que le genre western a l’habitude de promettre, Jusqu’au bout du monde (The dead don't hurt en anglais, qui contient un double sens « les morts ne souffrent pas » et « les morts ne font pas souffrir ») entraîne son spectateur dans des recoins émotionnels plutôt étonnants. En toute discrétion, un peu comme la sortie doit le film dispose, loin du battage médiatique des festivals et des grosses productions qui trustent nos écrans.

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le 7 mai 2024

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D. Styx

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