Petite pépite

Ce premier long de Ken Loach est un petit chef d'oeuvre. Une peinture naturaliste envoûtante de la Grande-Bretagne industrielle et populaire de la fin des années 1960, dont la vie est rythmée par le travail à la mine et les beuveries du samedi soir. Mais Ken Loach utilise le social comme simple toile de fond d'un récit intime. Celui d'un adolescent qui tente de survivre dans une société à laquelle il n'est manifestement pas adapté. A moins que ce soit l'inverse et qu'en défintive ce soit la société britannique, conservatrice et moraliste, incarnée par une institution scolaire aussie brutale que méprisante, qui se montre incapable de saisir la richesse profonde de ses mômes. Car derrière l'enfant revêche se cache un passionné de la nature qui parvient, au prix d'une patience et d'un sérieux prodigieux, à apprivoiser un faucon. La relation qu'il entretient à l'oiseau est une véritable histoire d'amour, le faucon incarnant les rêves d'évasion du milieu social de cet enfant malmené par son frère violent, les moqueries de ses camarades et les brimades de ses professeurs. A une exception près : un professeur un peu plus lucide et aimant que les autres va découvrir, stupéfait, la passion cachée de l'adolescent. Un ilot de bienveillance dans un océan d'indifférence.

On a pu reprocher à Ken Loach une approche par trop didactique dans nombre de ses films. Ici, il n'en est rien. Le jeune Loach propose un récit sans pathos ni effets tapageurs, et s'adonne même à quelques moments de grâce contemplative. Une petite pépite pour un grand classique.