Pas assez audacieux, pas assez inventif
Kick-ass est le film que j'ai le plus attendu en 2010 (voire celui que j'ai le plus attendu dans ma vie). Kick-ass 2 est le film que j'attendais le plus cette année, même si l'impatience n'était pas aussi élevée. Les bande-annonces et les spots TV étaient un peu moins excitants, bien qu'ils m'avaient rassuré par rapport aux craintes que j'avais concernant le changement de réalisateur. Matthew Vaughn, pour se concentrer sur le prochain film X-men, a laissé la place à Jeff Wadlow. Ce dernier a aussi été le seul scénariste de Kick-ass 2, alors que Vaughn avait écrit le script du précédent film avec Jane Goldman.
Les deux œuvres les plus marquantes de Wadlow jusque là étaient Cry_wolf et Never back down, pas de quoi être tellement enchanté donc...
De plus, avant même que le film ne soit confirmé, la lecture du comic Kick-ass 2 m'avait fait me demander comment il serait possible de l'adapter. Les changements apportés par l'adaptation cinématographique du premier comic mettaient dans l'impasse la suite vis-à-vis de certaines sous-intrigues, mais surtout Kick-ass 2 en comic est 5 fois plus fou, plus trash et plus violent que ne l'était le 1, qui avait déjà été adouci pour le cinéma.
L’intrigue du film s’écarte un peu du comic, mais ce n’est pas un mal. Wadlow apporte des idées nouvelles, mais en adéquation avec à la fois le comic et le premier film, auquel cette suite fait plusieurs fois écho, donnant une impression d’unité entre les deux long-métrages.
Le réalisateur et scénariste parvient à reprendre certaines scènes du comic en s’en détachant suffisamment, ce qui est sûrement difficile quand on écrit une adaptation.
Contrairement à ce qu’on pouvait penser quand il a été annoncé que le film reprendrait non seulement le comic Kick-ass 2 mais aussi Hit-girl, nous ne voyons pas l’un porté sur grand écran, puis l’autre, mais les deux se retrouvent mélangés, ce qui est bien pensé de la part de Wadlow.
Le cinéaste arrive également de façon assez intelligente à résoudre un des problèmes posés par l’adaptation du premier comic, par rapport au personnage de Katie.
Si la mise en scène de ce nouveau réalisateur est loin de valoir celle très inventive de Matthew Vaughn (hormis quelques idées, comme les SMS ou les bulles de BD qui s’affichent à l’image), il a tout de même de bonnes idées scénaristiques.
La scène de danse avec Hit-girl, la genèse de la nouvelle identité de Red Mist, … autant d’idées qui ne sont pas dans le récit d’origine et qui sont excellentes.
Et même lorsqu’on pense voir à travers les procédés scénaristiques de Wadlow, avec la seringue de "dernier recours" que nous présente Hit-girl en début de film et qu’on imagine sans mal avoir une fonction plus tard, on est malgré tout surpris en fin de compte.
Les personnages secondaires sont mieux exploités dans le film, c’est le cas de Todd, dont le rejet du groupe de super-héros s’avère être un changement très malin par rapport au comic, mais aussi des autres membres de la ligue de super-héros de Kick-ass. Ces personnages voient leur personnalité plus développée.
Une chose dont on ne peut profiter dans les comics, c’est les combats, et dans le film leur chorégraphie et leur violence est époustouflante.
Ca compense un peu, mais pas totalement, pour cette perte dans l’adaptation du caractère trash du comic, dont l’excès me faisait hurler de rire.
Par rapport à ça, le seul bon changement apporté, c’est le fait que Chris ne tue personne lors de son premier méfait, ce qui fait de lui un méchant de pacotille.
Le fait que le trash soit retiré du film est surtout problématique dans les moments "graves", transformés à chaque fois en des moments comiques, et avec un humour loin d’être fin en plus.
On savait déjà que la scène de viol du comic ne serait pas dans le film, c’est une des premières choses qui a été annoncées, mais l’alternative proposée est très décevante, voulant ajouter une touche humoristique là où il ne faut pas.
Le pire est lors du massacre des policiers par Mother Russia, où ses sidekicks font des commentaires débiles à chaque fois.
La seule idée un peu "trash" pas mal qu’apporte le film, c’est celle du "sick stick", qui offre des moments énormes, mais c’est quand même loin d’être aussi jouissif que ce que se permet le comic.
Et sans ses répliques qui sonnent comme un coup de fouet, tel que "We need to hunt this motherfucker down and make him wish his dad had finished on his mother’s tits", la Hit-girl du film est loin d’être aussi badass que son alter-ego de papier, malgré toutes ses scènes d’action à couper le souffle. Alors que dans le comic elle insultait Kick-ass car il pleurnichait après la mort de son père, ici elle se montre trop gentille et rassurante.
Par contre, ce qui est bien joué de la part de Wadlow, c’est d’avoir tourné à son avantage ce qui était un "défaut" : le fait que l’actrice ait vieilli. A l’époque où Kick-ass 1 venait de sortir, une des craintes des fans était que la suite se fasse trop attendre et que l’actrice Chloë Moretz ne soit trop âgée ensuite pour reprendre son rôle ; finalement Kick-ass 2 offre au personnage d’Hit-girl un traitement différent du comic, en la montrant se faire rattraper par ses hormones.
En dehors de la mise en scène moins recherchée et l’aseptisation de l’adaptation, le travail sur la musique est aussi moins élaboré, bien que les compositions de la BO restent les mêmes, et que le choix des chansons soit parfois sympa… mais d’autres fois pas tellement.
Ce qui ne change pas, c’est le fait qu’Aaron Taylor-Johnson, qui reprend son rôle de Kick-ass, est vraiment très bon. Il a un gros potentiel comique, la façon dont il prononce des répliques suffit à les rendre hilarantes ; c’était le cas dans le précédent film, c’est encore le cas ici, notamment avec son mémorable "Hell yeaaah !". La façon dont il le dit le rend tellement "dorky", et son intonation à elle seule montre que malgré son costume et sa notoriété, Kick-ass reste un gamin qui vit son fantasme de geek.
La fin du film, en plus d’être un happy end, rend la tâche difficile pour quiconque s’attèlerait à une suite.
Mais, s’il-vous-plaît, faites qu’il y ait une suite, et réalisée par Matthew Vaughn cette fois !
Kick-ass 2 n’est pas mauvais, il est même bien, on s’amuse beaucoup, il y a de bonnes idées, mais il souffre forcément de la comparaison avec le premier film et le comic sur lequel il est basé, tous deux tellement mieux !
J’ai revu Kick-ass 1 quelques heures avant la projection en avant-première au Grand Rex, et dans son genre c’est un chef-d’œuvre, avec son scénario bien ficelé, ses personnages bien développés, sa mise en scène imaginative, sa BO géniale, ses acteurs à fond, …
Kick-ass 2 allait forcément être moins bon, mais il aurait dû être mieux que ça quand même.