Je connais pas ou peu William Friedkin. Je ne vais donc pas m'étendre sur sa filmographie, et en même temps c'est pas trop le but. J'ai vu l'Exorciste, comme à peu près tout le monde et cela m'avait pas non plus transcendé, même s'il a marqué une génération, ce n'était tout simplement pas la mienne. Trop de longueurs, trop de lenteur, malgré un degré d'effroi non négligeable. Une chose est sur, ce réalisateur se permet tout.
Car comment pouvait-on croire à notre époque, et le lobby hollywoodiens existant, qu'un film de ce calibre pouvait arriver jusqu'à nos grands écrans français. Oui, Killer Joe est un film complètement barré. J'y allais déjà avec cet a priori, et pourtant j'ai été grandement surpris. Killer Joe fait ce tour de force d'avoir des scènes cultes dont on reparlera des années durant. Il ose tout, il est immoral à souhait.
En même temps il est servi par un propos qui est somme toute assez originale dans le contexte. En plein milieu du Texas, une famille où rien ne tourne rond engage un détective/tueur à gage pour assassiner "accidentellement" la matriarche afin d'obtenir la thune de son assurance vie. Et oui, le fils de la famille a fait le con avec la mafia local qu'il se doit de rembourser... Mais bon tout le monde veut sa part du butin. Vous voyez le décor quoi. De ce postulat, le film part en vrille et est servi par un défilé de personnages tous aussi barrés les uns que les autres, qui ont des choix et des réflexions qui défient l'entendement commun.
On croit surtout à ce cirque avant tout parce que l'écriture et l'interprétation des acteurs sont de très haut vol. McConaughey, que je n'ai jamais vraiment beaucoup aimé (en même temps il était souvent cantonné au playboy/second rôle/film de seconde zone) ,m'a tout simplement impressionné dans ce rôle de cow boy imprévisible d'une froideur extrême. Il a littéralement, pour paraphraser le film, "les yeux qui tuent"... Et que dire de Juno Temple qui incarne la petite fille perchée sur sa planète. Elle irradie l'écran de sa sensualité, de son innocence... Elle ira loin cette petite. Et puis les autres ne sont pas en reste que ce soit pour le père (complètement à côté de ses pompes), la belle mère (machiavélique, et beauf à souhait) et le fils incarné par Emile Hirsch comme il sait si bien le faire.
On est tout simplement baladé, surpris, mort de rire, mal à l'aise, abasourdi par ce qui se passe devant nos yeux. Un vrai défilé d'émotions qu'on ne voit que très très rarement au cinéma. Un vrai coup de coeur. Un film avec des tripes qui nous montre les très mauvais côtés du genre humain dans une Amérique profonde franchement flippante...