Parce qu'il a atteint les sommets dès ses débuts, Friedkin a très vite été condamné à rester dans l'ombre de ses comparses du Nouvel Hollywood, refusant de sacrifier son intégrité (son ego ?) à la toute puissance des studios dans les années 80 pour poursuivre sa quête du malsain, du glauque, du trash et du scabreux made in USA. Autant dire que son Killer Joe, à 77 ans, avait de quoi intriguer.

Premier constat : Friedkin est toujours aussi à l'aise dans l'art de distiller une ambiance malveillante sans trop se forcer, sans faire d’esbroufe ou de tape à l'oeil. Car en dehors de son miscasting avec Emile Hirsch (qui fait tout sauf dealer redneck), Friedkin a su s'entourer d'une belle panoplie de comédiens au diapason, Matthew McConaughey en tête qui se révèle être un psychopathe de haut niveau quand il le veut. Et si l'histoire ne casse effectivement pas cinq pattes à une vache texane, il faut dire que Friedkin sait occuper son temps en plaçant petit à petit ses personnages et en les caractérisant clairement à travers leurs actions. Le but ? Une explosion de mauvais goût dans la dernière demi-heure, entre fellation de poulet KFC, passage à tabac et dispute familial grand guignolesque. Friedkin, comme toujours, joue avec le spectateur, lui offrant un spectacle à la limite du supportable mais désamorçant le tout par un second degré très noir ; du coup, la dimension voyeuriste du spectateur prend réellement tout son sens. Oui, Friedkin ne déborde plus d'imagination en termes de narration, mais son cynisme et sa fourberie sont toujours celles d'un jeunot de 30 ans qui n'en a pas fini de régler ses comptes avec l'Amérique et son cinéma aseptisé.
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le 4 nov. 2012

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