“This is lovely. Now, who would like to say grace ?”

Série B, polar de la lose, Killer Joe met en scène une famille où la cruauté tente de l’emporter sur la bêtise. Sur un canevas éculé, qui peut faire penser à Fargo, (souvent très drôle, d’un humour noir acerbe et décapant ) on privilégie la caractérisation des personnages, que le spectateur aimerait pouvoir rapidement caser dans sa logique manichéenne habituelle. L’intérêt du film est de nous empêcher de le faire. Dans une vision très cynique du relativisme, le scénario donne ses raisons à chacun, un code qui pourrait presque être cohérent au vu de la raclure humaine avec laquelle il est obligé de frayer.
La réalisation est impeccable, fondée sur la durée et l’étirement, épuisante pour les nerfs des personnages qui craquent un à un, pour ceux des spectateurs qui se laissent prendre.
Déclinaison habile autour des rites du quotidien, notamment le repas, la pièce dont est issue le film joue constamment sur le clivage et invite à regarder la race humaine comme une espèce étrange, prévisible dans ses appétits et effrayante dans ses capacités à les satisfaire.
La mignonne adolescente, victime désignée, va devenir le véritable butin du film dans un enchainement de paliers de violence et de perversion qui n’arrêtent jamais le réalisateur.
Matthew McConaughey, qui s'est décidé en 2011 à faire des bons films, est extraordinaire de contenance et de perversion.
La farce grotesque, totalement assumée, qui clôt le film pourrait en gâcher le propos par un trop plein d’outrance. Il n’en est rien. A ce stade de l’intrigue, hypnotisés par les deux grands vainqueurs de ce jeu de dupes attardés, le flic et la jeune fille, on attend de voir exploser à l’écran ce qu’ils étaient jusqu’alors les seul à habilement dissimuler, et qui nécessite un rite cathartique paroxystique.
Sergent_Pepper
8
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à ses listes Poussif, Psychologique, Adolescence, Policier et Film Noir

Créée

le 11 sept. 2013

Critique lue 2.1K fois

53 j'aime

2 commentaires

Sergent_Pepper

Écrit par

Critique lue 2.1K fois

53
2

D'autres avis sur Killer Joe

Killer Joe
real_folk_blues
4

Poule et frite, mais 100 patates aussi.

Je revendique le droit de ne pas sucer le pilon frit de Friedkin. Merci de votre compréhension. Killer Joe, que tout le monde semble porter aux nus à grand renfort de notes et critiques...

le 4 mars 2013

76 j'aime

43

Killer Joe
Before-Sunrise
8

Killer Bill

Je n'avais vraiment pas envie de mettre 8 à ce film. Mais il m'y a forcé. C'est à cause de sa fin, Monsieur le Juge, j'vous jure ! Cette fin que certains qualifient de ridicule et indigeste, et dans...

le 30 nov. 2013

68 j'aime

1

Killer Joe
Kenshin
7

"Men like fat butts."

[Yep. Give me 30 minutes] Avec deux minutes de retard donc: Tu vois là j'écoute Walk de Pantera parce que ce morceau met grave la pêche, un peu comme ce film les jours de déprime. Je devais aller...

le 25 mars 2013

63 j'aime

19

Du même critique

Lucy
Sergent_Pepper
1

Les arcanes du blockbuster, chapitre 12.

Cantine d’EuropaCorp, dans la file le long du buffet à volonté. Et donc, il prend sa bagnole, se venge et les descend tous. - D’accord, Luc. Je lance la production. On a de toute façon l’accord...

le 6 déc. 2014

773 j'aime

107

Once Upon a Time... in Hollywood
Sergent_Pepper
9

To leave and try in L.A.

Il y a là un savoureux paradoxe : le film le plus attendu de l’année, pierre angulaire de la production 2019 et climax du dernier Festival de Cannes, est un chant nostalgique d’une singulière...

le 14 août 2019

714 j'aime

54

Her
Sergent_Pepper
8

Vestiges de l’amour

La lumière qui baigne la majorité des plans de Her est rassurante. Les intérieurs sont clairs, les dégagements spacieux. Les écrans vastes et discrets, intégrés dans un mobilier pastel. Plus de...

le 30 mars 2014

616 j'aime

53