Avec 𝐾𝑖𝑛𝑑𝑠 𝑜𝑓 𝐾𝑖𝑛𝑑𝑛𝑒𝑠𝑠, Yorgos Lanthimos nous invite à plonger dans un triptyque cinématographique qui explore les méandres du contrôle et de l'aliénation. Rappelant le surréalisme de 𝑇ℎ𝑒 𝐿𝑜𝑏𝑠𝑡𝑒𝑟 ou 𝐶𝑎𝑛𝑖𝑛𝑒, le réalisateur collabore une fois de plus avec Efthimis Filippou pour tisser une œuvre à la fois audacieuse et fragmentée. Si l'ambition du format anthologique est louable, elle met en lumière une inégalité entre les segments qui nuit à la cohésion globale.


Le premier volet, "The Death of R.M.F.", s'impose comme le plus abouti. Jesse Plemons incarne Robert Fletcher, un employé modèle écrasé par l'autorité tyrannique de son patron, joué par Willem Dafoe. Lanthimos dépeint avec une précision glaçante la manière dont le contrôle s'immisce dans chaque aspect de la vie de Robert, jusqu'à l'intime. Lorsque l'ordre de commettre l'irréparable est donné, la rébellion de Robert ouvre la porte à une spirale de désespoir et de questionnement existentiel. La performance de Plemons est ici remarquable, conférant une profondeur saisissante au personnage.


"R.M.F. is Flying", le deuxième segment, peine à maintenir l'élan du premier. Centré sur le retour énigmatique d'une femme disparue, il oscille entre mystère et horreur psychologique sans réellement s'engager. Bien que Plemons offre une interprétation nuancée d'un personnage en proie au doute, le récit manque de la densité émotionnelle nécessaire pour captiver pleinement.


Le dernier acte, "R.M.F. Eats a Sandwich", mêle grotesque et tragédie dans un dénouement aussi étrange que dérangeant. On y retrouve le personnage d'Emily, interprétée par Emma Stone, qui s'enfonce dans les arcanes d'une secte obsédée par la résurrection des morts. Lanthimos exploite ici son goût pour l'absurde, questionnant les limites de l'humanité face à l'endoctrinement. Willem Dafoe, en gourou charismatique, et Margaret Qualley, en figure ambiguë, enrichissent un casting où chacun se surpasse, même si pour celui ci Emma Stone demeure le pivot central.


Si 𝐾𝑖𝑛𝑑𝑠 𝑜𝑓 𝐾𝑖𝑛𝑑𝑛𝑒𝑠𝑠 souffre des écueils typiques des films à sketches, notamment une disparité qualitative entre ses parties, il n'en reste pas moins une œuvre portée par la maîtrise technique de Lanthimos et la puissance de jeu de ses acteurs. La réalisation soignée et l'atmosphère singulière qui s'en dégage parviennent à maintenir l'intérêt malgré les fluctuations narratives.


En définitive, ce film n'est peut-être pas le plus marquant de la filmographie de Lanthimos, mais il témoigne de son audace créative et de sa volonté de repousser les conventions. Une expérience cinématographique imparfaite, certes, mais qui mérite d'être vécue pour ses moments de fulgurance et sa singularité artistique.

dosvel
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le 17 nov. 2024

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