A la fin du "King Kong" de 1976,le singe géant périssait,mitraillé par les méchants humains au sommet du World Trade Center,ce qui ne pourrait plus arriver aujourd'hui grâce à nos amis d'Al Qaïda.Dix ans plus tard,le singe mort est toujours vivant,car sans lui il serait difficile de sortir un "King Kong 2".Ce brave animal mourant a donc été récupéré par un institut dans lequel des scientifiques tentent sans succès de le réanimer.Depuis dix ans,oui,ces gens ont de la suite dans les idées.On ignore dans quel but ils font ça,créer un monstre de foire?Se livrer à des expériences nobelisables?,peu importe,ce qui compte est que la bête survive.Il faudrait pour le réveiller lui fournir du plasma mais le primate étant le seul de son espèce,aucun donneur n'est en vue.La doctoresse qui le soigne dit qu'il faudrait un miracle,et c'est précisément à cet instant que le miracle survient.Sur une île du côté de Bornéo,un aventurier ringard et fauché découvre par hasard une femelle singe géante,appelons-la Queen Kongette,qu'il s'empresse de vendre à l'institut.La voici donc transportée aux States pour y servir de donneuse de plasma sur écran.L'opération se passe si bien que Kong ressuscite et,revigoré par l'odeur de la gonzesse,casse tout pour se barrer dans la cambrousse avec sa dulcinée.Eh oui,les humains,qui n'ont décidément rien appris depuis les quelques menus dégâts survenus dix ans avant,croyaient pouvoir contrôler le phénomène alors qu'ils ne contrôlent évidemment rien du tout et se retrouvent avec le même problème,mais multiplié par deux.Toujours aussi subtils,ils envoient l'armée afin de dégommer les fuyards.Mais Amy,la doctoresse,et Mitchell,l'aventurier,qui sont tombés amoureux l'un de l'autre et sont très gentils,tentent de sauver leurs protégés,qui sont également très gentils et ne demandent qu'à vivre leur amour tranquillement au sein de Mère Nature.Il faut évidemment pour comprendre ça occulter le fait que la scientifique travaille pour un organisme dont les objectifs ne sont pas très clairs concernant son captif,et que le gars a capturé Kongette,l'a arrachée à son milieu naturel et l'a vendue comme un quartier de bidoche.Remords et sentiment de culpabilité sans doute.Le film de 76 était très bon mais,trop comparé probablement au chef-d'oeuvre de 1933 signé Cooper et Schoedsack,il fut un semi-échec public et un four critique,ce que le célèbre producteur Dino de Laurentiis n'avait semble-t-il guère digéré.Le voilà donc qui remet le couvert en 86,décidé à se refaire,d'autant que le singe mécanique concocté par le grand Carlo Rambaldi traînait encore dans les entrepôts de la De Laurentiis Company et ne demandait qu'à resservir.Le réalisateur du premier opus,le solide vétéran John Guillermin,est aussi réembauché,et vogue la galère.Après tout,le film de 33 avait connu également toute une série de suites acrobatiques,alors pourquoi pas tenter le coup?Hélas pour Dino,qui malgré son prénom n'avait pas anticipé la mode des films de dinosaures,"King Kong 2" sera un échec total,beaucoup plus cuisant que celui du premier opus.Mais au fil du temps l'oeuvre est devenue culte,accédant à ce statut envié par le biais de la catégorie des nanars rigolos,ce qui est tout-à-fait mérité.On se marre bien dans cette suite échevelée au script incohérent et invraisemblable qui part dans tous les sens au gré de graves chutes de rythme,ce qu'on doit à Ronald Shusett,le nouveau scénariste,qui est au passage producteur exécutif.Mais il faut pour être juste préciser que la drôlerie est souvent volontaire,même si ce n'est pas toujours le cas.Kong résiste à tout:bombardé par les bidasses,gazé,drogué,enseveli sous les pierres,il continue à exercer ses activités,porté par la force de l'amour.Sa façon de gober des crocodiles ou des péquenots comme vous avaleriez des sushis est délicieuse.Le film est une romcom simiesque,doublée d'une romcom humaine puisqu'on suit en parallèle les histoires de Kong et Kongette et d'Amy et Mitchell,ce à quoi s'ajoute,savamment distillée,une incursion dans la partie carrée zoophile car le singe et la fille,tout comme le mec et la gorillette,éprouvent des sentiments un peu limite les uns pour les autres,n'oublions pas que la franchise se veut un éloge de la différence.Finalement,on assistera à la gestation la plus rapide de l'histoire des primates,mais rassurez-vous Mitchell n'est pas le père,du moins on l'espère.La musique est nulle,car on n'a pas eu les moyens de refaire appel à John Barry,et les effets spéciaux sont monumentaux,entre rapports d'échelles démentiels et transparences foireuses dignes des années 30,tandis qu'on y va à fond dans l'anthropomorphisme,la gestuelle et les expressions faciales des animaux étant si calquées sur celles des humains que ça en devient assez ridicule.Encore à cause des sous,le casting a été entièrement renouvelé pour faire place à une distribution au rabais.Plus de Jeff Bridges,de Jessica Lange ou de Charles Grodin,on a recruté des acteurs moins connus.Celle qui a la plus grande notoriété est Linda Hamilton,starisée deux ans plus tôt par "Terminator".Très jolie à l'époque,elle montre cependant ses limites de comédienne dans ce contexte où elle doit porter le film,ce qui n'était pas le cas dans le Cameron.Mais il y a bien pire avec son camarade Brian Kerwin,issu de la télé et complètement incompétent.Le mec promène son air ahuri au milieu d'une tronche de playboy défraîchi au regard inquiétant tirant vers le strabisme qui le fait ressembler à un anormal.Sa carrière de vedette de cinéma s'arrêtera à ce haut fait d'armes.John Ashton,bon second rôle connu pour sa participation à la saga "Le flic de Beverly Hills",compose un savoureux colonel belliqueux et cinglé qui parait avoir fortement inspiré celui qu'interprète Samuel Jackson dans "Skull Island".Notons la présence de silhouettes toujours plaisantes à apercevoir,à l'instar de Mike Starr en grosse brute militaire ou Leon Rippy en chasseur plouc et stupide.