Une vrais proposition de cinoche !

Final Fantasy XV, qui sort fin Novembre, est l’héritier d’une saga culte, en perpétuelle évolution et qui n’a eu de cesse de vouloir repousser les limites de son cadre originel, le jeu vidéo. Car la principale ambition de la saga depuis 2001 et la sortie de Final Fantasy: Les Créatures de l’esprit est de devenir un géant transmédia unique en son genre. Malheureusement le destin est capricieux et Les Créatures de l’esprit (bien que techniquement avant-gardiste) se prenait de plein fouet le mur du box-office dans le museau, mettant au passage en sérieuse difficulté Squaresoft qui dut fusionner avec Enix. Bien refroidi par cette première tentative, le studio voulait 21repartir sur des bases beaucoup plus solides pour son second essai, en offrant une suite à l’épisode le plus iconique de la saga, Final Fantasy VII. Le film beaucoup moins ambitieux que son prédécesseur se présentait comme un bonus aux fans. Arrive alors après cette histoire tourmentée Kingsglaive, introduction tonitruante à Final Fantasy XV qui se paie aussi le luxe d’un anime, Final Fantasy XV Brotherhood. Alors proposition filmique ou pub faite à l’arrache pour vendre des cartons de jeux ?
Pour commencer on sent qu'avec le projet Final Fantasy XV Square retrouve une certaine ambition qu’ils avaient perdus depuis l’accident industriel économique que fut leur première incursion filmique. Cependant la firme n’a pas encore retrouvé son statut d’antan, de l’âge d’or après Final Fantasy VII. Car le moins que l’on puisse dire c’est que la trilogie Final Fantasy XIII ne fut pas au goût de tous. Arrive donc Kingsglaive censé préparer le terrain avec la série Brotherhood, à ce que Square espère comme le triomphe FF XV. En ce sens le film souffre encore de l’échec des Créatures de l’esprit car refroidi de cette expérience, le studio Square utilise les films comme compléments des jeux. Ainsi la mise est répartie entre plusieurs projets en cas de coup dur. De ce fait je ne m’attendais pas à grand chose et qu’elle ne fut pas ma surprise de voir un film beaucoup plus ambitieux que prévu avec une vraie volonté de faire du cinoche. C’est donc d’autant plus dommage que Square n’ait pas eu la confiance de tenter une sortie en salle parce que le côté DTV en plus de son statut de produit dérivé ne mettent pas vraiment en confiance. Ce qui est dommage car le film est bourré de qualités.

Tout d’abord commençons par l’évidence, la technique est juste sublime, le photo-réalisme a été poussé à son paroxysme et il arrivait souvent pendant le visionnage que mon cerveau bug en se demandant si c’était toujours de l’image de synthèse qu’il regardait. Que ce soit les particules, la fumée ou les flammes, Square sait gérer ses effets à la perfection et ne se prive pas pour nous les montrer, quitte à surcharger l’écran d’informations. Il faut aussi souligner le travail de l'équipe de Square dans le chara-design, ou de manière plus générale, l'esthétique globale du film qui est magnifique, brassant science-fiction et médiéval fantasy comme seul Final Fantasy sait le faire. Qui plus est, le film ne souffre pas vraiment du problème de la Uncanny Valley qui est le risque inhérent à ce genre de production CGI photoréaliste. La Uncanny Valley pour ceux que si demandent, c’est le fait qu’un visage artificiel -à partir d’un certain degré de ressemblance à la réalité- aura ses défauts qui ressortiront beaucoup plus. C’est ce que vous ressentez en regardant ce genre de robots humains japonais dernier cri. Leurs visages semblent humain mais ils en sont d’autant plus dérangeants car tout les petites imperfections semblent amplifier et prendre le pas sur le reste. Bref tout ça pour dire que Kingsglaives avec ses visages a, en mon sens, dépassé cette étape pour en créer des parfaitement organiques. Même si par moment il y a des baisses dans l’animation ou dans la qualité par-ci par-là, le tout reste vraiment très léché. De même que l’écriture des personnages qui, même si elle s’inscrit dans des canevas stéréotypés assez clairs, reste vraiment efficace pour nous attacher aux différents protagonistes notamment Nyx, notre héros. Il sera ici question de complot, d’honneur, de pouvoir, de combat entre le Bien et le Mal, ainsi que de sacrifice et de devoir. Bref plein de bonnes choses qui, à défaut d’être nouvelles, sont bien amenées.
Un autre point très agréable est que le réalisateur a conscience de tourner en CGI et donc se permet des plans extrêmement impressionnants avec sa caméra virtuelle en usant par exemple de longs travellings reliant deux personnages à travers une longue distance, ou des mouvements ultra-rapides pour suivre les personnages se battre à la vitesse de l'éclair, les Kingsglaives pouvant se téléporter. De même cette caméra très mobile permet des jeux d'échelle, passant d'un combat de très grande ampleur à un duel à taille humaine. On pourra cependant noter que même si cela rend des scènes très impressionnantes il est facile d'être perdu par la vitesse et la liberté totale de la caméra en mouvement lors des batailles. Il faut aussi parler de la musique qui, même si elle est très bonne et accompagne à la perfection le film, n'est pas marquante après le visionnage. C'est dommage car les scores des Final Fantasy sont pour la plupart des chefs-d'oeuvre.

Qui plus est, le film souffre des défauts inhérents à une oeuvre cross-média c’est-à-dire que certains personnages comme le frère de la Princesse Lunafreya sont plus qu’esquissés pour être développés ultérieurement, tandis que beaucoup de trames narratives ne sont pas bouclées à la fin du film. Tout ça bout à bout fait que l'on arrive pas à apprécier l’oeuvre comme un tout mais plutôt comme un morceau de quelque chose de plus grand. C’est un peu le symptôme des studios Marvel, qui sacrifient l’unité de chacun des longs-métrages au profit d’une oeuvre globale. La manœuvre est compréhensible mais un peu frustrante. De même que certains aspects de l’univers sont à peine aperçus pour être développés eux aussi dans une autre oeuvre, ce qui fait qu'il faut accepter de ne pas tout comprendre même si ça sort un peu du film.

Reste une question, à qui est destiné ce film ? Clairement, pas besoin d’être fou de Final Fantasy, je n’ai personnellement fait que le XII et j’ai à peine touché au XIII pourtant j’ai pu savourer pleinement le film, ce n’est pas un film uniquement destiné aux fans. En revanche, si vous êtes sûrs que vous ne ferez pas le jeu, vous ne profiterez pas d’une expérience complète. C’est finalement comme regarder La Communauté de l’Anneau et pas les suites. On ne sait pas encore si le jeu sera à la hauteur étant donné le chaos qu’a été sa conception mais en revanche ce Kingsglaive marque à n’en pas douter des points. La série quant à elle, même si je ne l’ai pas finie, est à mon sens plus dispensable et se concentre sur Noctis, le héros du jeu qu’on ne voit pas dans le film. Je vous recommande donc chaudement Kingsglaive, surtout si vous voulez vous imprégner de l'univers unique des Final Fantasy, car ce film est une porte d'entrée vraiment très agréable. Après il faut garder en tête que le film ne peut prendre sa vraie force que couplé au jeu, j'ai envie de dire c'est la limite du système.