Kingsman : Services secrets
Synopsis : Après la mort de l’un des agents de Kingsman, une agence de services secrets britannique, Harry Hart (Colin Firth) se rend chez la femme de celui-ci, et remet un médaillon à son fils, Eggsy (Taron Egerton). 17 ans plus tard, alors qu’un autre Kingsman meurt, Eggsy a des problèmes avec la justice. Il fait appel à Harry pour le sortir de là, ce que celui-ci fait immédiatement. Devant trouver un poulain pour participer à un concours d’entrée à Kingsman, Harry se penche logiquement sur Eggsy, en qui il voit des capacités idéales. Ils sont alors huit à se positionner pour la place laissée libre, alors qu’un certain Richmond Valentine (Samuel L. Jackson), magnat des télécommunications à l’étonnante envie d’anéantir une grande partie de l’humanité. Deux histoires distinctes qui vont petit à petit se rapprocher puis s’entremêler.
La critique : Le 18 février, Kingsman inondera les écrans des cinémas français de sa singularité, de son excentricité dans le cinéma actuel. Alors que la plupart des réalisations se basent sur des idées déjà utilisées et réutilisées et dont le succès ne fait pas de doute, le réalisateur Matthew Vaughn a misé sur l’adaptation d’un roman graphique d’espionnage, signé par son grand ami Mark Millar. Les deux hommes ont déjà, ensemble, mis au monde Kick Ass, et enchaînent avec ce deuxième OVNI cinématographique, du moins parmi les films à gros budget. Le cinéma aseptisé, ce n’est pas pour eux.
Et pourtant, de belles têtes d’affiche les ont suivis, comme si de rien n’était, et au péril de leur rentabilité: Colin Firth, acteur principal de la première moitié du film, en Kingsman (traduire espion) toujours propre sur lui, Samuel L. Jackson, en grand méchant zozotant, ou encore sir Michael Caine, qui incarne ici ce qui pourrait être la retraite de son personnage phare, Harry Palmer. Pour les accompagner, on notera le jeune et tout nouvel acteur Taron Egerton, déjà convaincant dans un rôle pas facile à s’accaparer et malgré un doublage français à vomir.
Mais ce qui prime bien évidemment, dans Kingsman, c’est ce mélange d’un esprit tout à fait américain, tout à fait spectaculaire, qui est celui des Comics, et d’un art tout ce qu’il y a de plus anglais, les histoires d’espionnage. Se pliant aux besoins d’un mélange des genres, Kingsman prend certaines caractéristiques de chaque côté mais en évacue certaines, pour alléger le rendu et surtout le rendre cohérent. Ainsi, pas d’explosions en permanence, pas de super héros (le vêtement des personnages principaux est ici un élégant costume sur mesure, accompagné de ses accessoires tendances), et pas de répliques cinglantes en permanence, comme nous y avaient pourtant habitués les adaptations des romans graphiques américains. A l’inverse, contrairement à ce que James Bond, Jason Bourne ou Harry Palmer, par exemple, nous y avaient habitués, il n’y a pas d’espion star, Taron Egerton prenant petit à petit le dessus sur Colin Firth, celui-ci s’effaçant petit à petit et se retirant…brutalement.
Mais, finalement, les deux genres semblent avec Kingsman faits pour se rencontrer, et on peut presque s’étonner que l’idée ne soit jamais apparue avant. Ainsi, les accessoires d’espions popularisés par James Bond, le grand méchant ou les scènes de combats sont autant de moments propres aux deux scènes et qui font penser que la différence entre les esprits américains et anglais n’est pas si grande, malgré un esprit et un humour so british. La réalisation, très décalée, s’adapte à la fois à l’univers des comics et à celui du cinéma d’espionnage, aucun de ces deux mondes ne voulant être réaliste. Et il faut dire que les scènes de combat sont des moments forts d’une pure folie, à commencer par celle qui introduit le film, brève mais puissante, sur Money for nothing de Dire Straits. Une autre suivra, encore plus incroyable de part son contexte, puisqu’elle voit l’un des Kingsmen se battre dans un bar avec des racailles de bas-étage. Encore une fois, le choix de Free Bird de Lynrd Skynrd n’est pas anodin puisqu’il offre un décalage parfait et une sensation d’osmose avec le métrage à l’écran.
On touche là au but principal de Kingsman, amplement accompli: Une sorte de parodie des films d’espionnage, James Bond en tête. L’attitude des Kingsmen, exagérément propres sur eux et se recoiffant au milieu des actions, les scènes de combat qui voient ces mêmes Kingsmen humilier tous leurs adversaires, ou encore la relation entre Taron Egerton et une princesse suédoise, à la façon des James Bond girls (mais l’ambiguïté des relations de 007 n’ayant rien à voir avec le rentre-dedans d’une des scènes finales), sont autant de points sur lesquels s’appuie ce film pour pasticher, en forme d’hommage, l’un des plus grands héros du cinéma. Et, du même coup, les meilleures histoires écrites par Fleming mais aussi par certains grands auteurs de comics.
En fait, dans Kingsman, tout est bon, dans la mesure où on s’attend plus à voir de l’action que de la réflexion. En gardant en tête le fait que ce film est une parodie des genres qu’il utilise, il n’y a rien à lui reprocher. Certaines scènes sont tout simplement magiques et vont rester dans les mémoires, quand les autres se fondent parfaitement dans le rendu final. On regrettera peut-être que le rôle de Colin Firth ne soit pas plus important, tant l’acteur oscarisé est excellent dans ce rôle. Mais on ne peut pas tout avoir, et si Kingsman n’est jamais un grand film, ce qu’il n’a d’ailleurs pas la prétention d’être, il est en tous cas un excellent divertissement. Là où bien d’autres ont échoué, Kingsman fait mouche, et ça fait du bien.