L'avion comme symbole de l'évasion depuis une Argentine rurale, c'est pas mal, comme idée. Après la dictature, son pilote reconverti dans le génocide d'insectes s'en sert toujours comme outil de travail, et le brandit comme une croix pour exorciser un passé traumatisant qui a laissé des traces. Tout y était.
Tout y était, oui, mais ce serait oublier la malédiction de Darín voulant que cet acteur grandiose fût emprisonné dans des rôles sans envolée. Que cela ne me laisse pas, pour une fois, jeter le voile sur l'écriture du personnage : homme hanté et oppressé, il se cache à la société mais encore plus au spectateur, pour une révélation qui n'en est que plus marquante.
Le problème est à une plus grande échelle : la vie du village, vanté pourtant comme une microsociété où "tout se sait", n'existe pas en-dehors de ce que nous en transmettent une poignée de protagonistes forts. Le mystère est longtemps mis de côté et sa poésie brimée. On aurait pu avoir une histoire d'amour en guise de soutènement, mais on se retrouve en fait avec son pendant négatif : une histoire de jalousie, qui n'a d'ailleurs jamais grand chose à voir avec le thème de fond que le film se propose de résoudre.
Élégant et mesuré, Kóblic est un bon film parce qu'il laisse beaucoup de choses imprégner la pellicule : les habitudes et les problèmes communs des habitants, leur défiance et la résignation sont des aspects autonomes qui laissent une bonne empreinte. Au-delà de ça, c'est un film passif et reposant trop sur ses personnages qui s'est fermé à un joli potentiel.
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