Pourquoi défendre un film si détesté quand on reconnaît soi-même qu'il n'est pas génial ? Parce que L.A. Zombie a su m'emmener...ailleurs. Du coup, en cette heure tardive (c'est la rentrée, que voulez-vous), j'ai bien envie de me faire le porte parole d'une minorité silencieuse qui n'en demandait pas tant.
D'abord, il faut savoir que L.A. Zombie, tel que sorti en salles puis en DVD, est la version amputée d'un cut originel fourni en ébats pornographiques gay friendly. Non pas que le film vire de bord une fois privé de va-et-viens explicites, mais il devient encore moins facile à classer. J'imagine, n'étant pas allé traquer cette version longue, qu'elle rend le film plus commun, genre "On a fait un porno gay, essayons de bricoler un film autour avec les 200 $ qui nous restent". 200$, c'est pas le budget du film mais quand tu vois sa gueule, tu te dis que c'est pas loin. Pourtant, le long-métrage à l'air d'ignorer la beauté tout comme il se fiche de laideur.
Emergeant des eaux sur une plage déserte, un gugusse taillé pour la lutte romaine mais au faciès bleuté et aux dents proéminentes s'en va arpenter les rues de Los Angeles. Sans but, il erre d'un pas lourd entre diverses rencontres qui sont autant de profanations. En effet, le bestiau a pour loisir de copuler avec des autochtones fraîchement décédés (accident de la route, alcoolisme, meurtres...), son engin ayant la faculté de ressusciter le partenaire, forcément passif, une fois la besogne accomplie. Ce sont les scènes venant après la résurrection qui ont été enlevées, ces passages là restant donc soft.
Mais si le film a pu aller jusque là, c'est parce que ce maquillage cheap dissimule François Sagat, figure connue du porno gay ici mise à contribution par un certain Bruce LaBruce, issu du même milieu et déjà auteur de Hustler White. D'ailleurs, Sagat change de forme sans phase de transformation au cours du voyage, passant de monstre marin au gourdin repoussant à une silhouette torse poil et encapuchonnée tout aussi mutique. Tourné à même le bitume de la ville, dans des recoins squattés par la misère, L.A. Zombie y puise sa crudité esthétique, appuyé par une mise en scène qui ne cherche pas à planquer son dénuement.
Car de cette allure, le film tire un sens de l'imprévisible baigné d'un réel sans qui cette fiction sexuée n'aurait pu exister. Très court (1h10 générique compris), "L.A. Zombie" trouve sa force dans des effets minimum, comme ce carton qui sert d'abri à un SDF et où, une fois à l'intérieur, notre créature découvre une pièce immense où traîne une peluche de licorne, comme une fleur sur un tas d'ordure. Ou encore ce tournage X vu de l'extérieur, chopé entre deux balades au gré des lumières de la ville. Irritant quand il prend la pose, "L.A. Zombie" captive grâce à sa liberté de ton, le film agissant comme s'il était seul au monde, sans plus personne pour le voir.
Pas de quoi faire un vrai bon film mais étant sensible aux essais singuliers, je dois avouer que celui-là ne m'a pas déplu !
Note : @Kenshin, à toi de voir si le film a ou non sa place sur ta liste :)