Lulu Wang s’est inspirée de l’histoire vraie, basée elle-même sur un mensonge, de sa famille pour écrire le sujet de son nouveau film. L’histoire de sa grand-mère, atteinte d’un cancer des poumons en phase terminale, à qui on décide de cacher l’implacable diagnostic pour préserver la joie et l’harmonie de ses dernières semaines à vivre. Et pour que chacun puisse la voir une dernière fois avant sa mort prochaine, on organise une cérémonie d’adieu en forme de faux mariage pour pouvoir réunir autour d’elle amis et famille (dont certains membres vivent en Amérique ou au Japon), sans qu’elle ne sache jamais rien (interdiction formelle de lui révéler le pot aux roses malgré l’envie de sa petite-fille) de ce qui se trame autour de son cas.


Famille, secret, sentiments, vérités et mensonges, on se croirait dans un Kore-eda Hirokazu. Sauf que non. Vendu comme la pépite du festival de Sundance de l’année dernière, L’adieu n’a toutefois rien du petit chef-d’œuvre annoncé. Produit en partie par A24, pourtant peu avare en prises de risques cinématographiques avec, à la clé, déjà de futurs classiques (The witch, Moonlight, A ghost story, Under the skin…), L’adieu n’est qu’une gentille sucrerie dont on peine à cerner l’identité et la singularité. Et si Wang, sur un tel sujet (la mort, la séparation, le deuil…), a le mérite de ne pas verser dans le pathos ni dans la sensiblerie, son film manque néanmoins d’un véritable souffle émotionnel prompt à nous ravir.


En se tenant à une simple transcription des faits, à une sorte de distance bienveillante, Wang passe finalement à côté (ou alors les traite sommairement) des ressorts possibles qu’offrait son récit : comiques (les mines "d’enterrement" de la famille en opposition aux festivités du mariage), sociaux (écart générationnel, difficulté de trouver sa place…), culturels (choc des traditions entre la Chine et les États-Unis) et narratifs (Nai Nai est-elle éventuellement au courant de sa maladie, faisant croire qu’elle ne sait rien pour qu’on ne s’apitoie pas sur son sort ?). Au moins le duo formé par Shuzhen Zhao et Awkwafina (respectivement Nai Nai, la grand-mère fringante, et Billi, la petite-fille un peu paumée) fonctionne à merveille, apportant (enfin) ce qu’il faut de tendresse et d’instants malicieux à un film décidément bien trop sage.


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mymp
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le 8 janv. 2020

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