Le film est un paradoxe à lui seul. Quand il semble tenir sur son seul récit, la présence de son fabuleux casting est un handicap évident (la personnalité de Gabin, notamment, emporte tout sur son passage alors qu’un inconnu aurait davantage fait l’affaire). Quand la distribution semble être l’atout majeur du film, le résultat paraît gâché par une mise en scène maladroite qui peine à retranscrire la chronologie de l’affaire. Et que dire de l’ultime scène du film où l’avocat en personne de Gaston Dominici (incarné par un acteur…) vient dérouler une diatribe du système judiciaire français ? Film militant, à la façon du Pull-over rouge, l’histoire perd forcément en authenticité. Plutôt que de retrouver ses habitudes de jeunesse lorsqu’il était lui-même reporter, puisqu’il fut reporter de guerre en Indochine, Claude Bernard-Aubert fait des choix parfois surprenants dans sa façon de choisir les moments clés d’une affaire qui ne fut jamais élucidée. Mais fausse enquête et vrai film à charge font du récit qui nous est proposé un résultat trop bancal pour être honnête.


Pour réducteur que soit l’angle choisi par le réalisateur, le récit de cette étrange affaire met en lumière des personnages atypiques avec une certaine efficacité. Au-delà de ses interprètes, tous excellents, le film parvient à saisir l’atmosphère de l’époque et ne manque pas de fustiger la presse en quête de sensationnalisme. Montrer les photographes soulever le drap recouvrant les corps pour mieux vendre leurs journaux en est un exemple saisissant. Le face à face entre le patriarche et le commissaire vaut aussi le détour même si la qualité de ses deux interprètes (Paul Crauchet toujours aussi juste) enjolive certainement la réalité. Quant à la place des femmes dans cette drôle de famille, elle donne à voir combien il était nécessaire d’évoluer.


Hésitant entre le témoignage historique et le film partisan, Claude Bernard-Aubert vise l’efficacité et force est de reconnaître que son entreprise est, de ce côté-là, une réussite. Le récit se suit avec un réel intérêt et les péripéties sont bien mises en lumière. La mise en scène est, en revanche, un peu plate, mais le résultat est indéniablement passionnant à suivre. Maladroit mais pertinent.


6,5

Play-It-Again-Seb
7

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le 26 mai 2024

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PIAS

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