J'ai mis du temps à me décider d'écrire une critique de ce film. En effet à sa sortie, le film m'avait intrigué et je l'avais beaucoup aimé. Donc en principe cela devrait suffire. Ensuite, je l'ai revu et là encore pareil, j'ai toujours autant apprécié. Cela dit, plus j'y repense, plus un constat commençait à poindre : Je me suis fait avoir par ce film. En même temps c'est le but d'un film, proposer une fiction avec un univers qui peut parfois dérouter ou nous surprendre. Et ce film entre dans cette catégorie. Mais plus j'y repense, plus j'ai l'impression que l'adaptation de la nouvelle est comme un bateau qui prend l'eau de toute part.
Réalisation à mi-chemin du thriller fantastique et de la comédie romantique
A la réalisation on a George Nolfi qui n'a à son actif...que ce film qui est sa seule et unique réalisation (il aussi connu comme étant le producteur d'un film aussi osef que The Sentinel et le scénariste de films comme la Vengeance dans la Peau et Ocean's Twelve). Et là il nous offre une réalisation correcte et bien rythmée qui donne des aspects à la fois thriller, polar et comédie romantique (avec tous les clichés qui vont avec; oui, je ne vous ai pas dit que je détestait les comédies romantiques ?). Mais bon l'ensemble est quand même efficace et les transitions entre les années ont quand même du sens. Du moins assez pour justifier les éléments du scénarios et renforcer le caractère assez hasardeux du film. Bref, ce film au niveau de la réalisation et de la mise en scène, c'est quand même efficace. Tout comme au niveau des personnages.
L'amour interdit
Au niveaux des héros, on a David Norris incarné par Matt Damon qui était dans sa période post - Jason Bourne et retour au films d'auteurs (Bref, après les Infiltrés et True Grit et avant Promised Land et Elysium pour vous situez). Et là il incarne un jeune politique promis à un grand avenir aux élections sénatoriales, mais handicapé par son impulsivité et son désir d'être plus guidé par ses émotions que par sa raison. Et cette schizophrénie est atteinte par l'arrivée de Élise Sellas (Emily Blunt, qui n'était pas encore la super actrice de maintenant) qui est...assez absente dans le film. Ouais.
Sinon, nous avons les membres de l'agence. A commencer par Harry Mitchell (Anthony Mackie). Il est le membre qui a fait une erreur dans la marche du destin de David et qui est indirectement responsable de ce qui lui arrive. Il est au final perclus de doute et essaye de comprendre pourquoi malgré tous les efforts employés, le destin met toujours David et Elise sur leur route et il va essayer de les aider sans trop interférer. Et il est pour moi le personnage qui synthétise ce qui va et ce qui ne va pas dans ce film.
Richardson (joué par le Mad Men John Slattery, qui est aussi la version âgée d'Howard Stark) est un personnage auquel on a donné de l'importance et qui est classe. Il est un membre de l'agence qui dirige les équipes chargés de faire à ce que tout se déroule selon le plan. Le seul problème est que dans le film il a beaucoup d'importances et de charisme et brusquement...il disparaît, mais vraiment. Il n'apparaît plus du tout pour mettre en avant un autre personnage.
Thompson (Terrance Stamp) est...celui qui remplace Richardson. Oui il est bien introduit mais visuellement il remplace le personnage de Richardson. Il s'agit presque du grand méchant du film. Surnommé le nettoyeur, il est plus radical et impitoyable que les 2 précédents...et c'est là d'où vient le bordel.
Le reste est assez oubliable. Mais le film n'accorde pas beaucoup d'importance aux autres personnages qui ne sont que satellites, mais quand même marquant à l'image du meilleur ami de David Charlie (joué par le second rôle Michael Kelly).
Un film sur le destin, mais dont le concept est laborieux.
Je ne sais pas quoi penser de l'histoire du film. Si on prend comme une adaptation de la nouvelle de Philip K.Dick, il s'en éloigne de très loin et prend beaucoup de liberté. A commencer par rendre l'Agence une entité encore plus mystérieuse. Le récit est quand même assez classe prise comme une comédie romantique. Et c'est là que ça se corse. Je n'arrive pas à comprendre les enjeux du film. Si on prend le film comme étant un thriller, cela passe car la réalisation est vraiment bien exécutée, les personnages sont attachants et l'histoire est cool. Malheureusement ça ne va pas avec le concept que le film nous a vendu. Et ça à cause de l'Agence. Bon ok, tout arrive parce que Mitchell a fait une gaffe car il a l'air le plus humain des personnages de l'Agence ce qui est déjà une bonne idée. Le problème est que pourquoi étendre ça à tous les autres membres de l'agence ?
Dans la scène après la "gaffe" (enfin, pas vraiment une gaffe, c'est juste une succession d'incidents aléatoires), on voit David dévier du plan mais d'un seul coup sans prévenir, il découvre le secret de l'Agence au détour d'une porte et voit les membres réinitialiser tous les membres de la campagne
C'est n'importe quoi, des personnes qui sont sensés être secrètes se faire gauler comme ça, ça n'a aucun sens. Et le film est comme ça, il y a tellement de rebondissements qui ne vont pas ensemble que ça gâche toute la cohérence du film. Oui, le film est vraiment mal écrit à ce point là. Du coup on ne sait pas ce que sont les Agents au fond. Parce que si ce sont des "anges" et que le grand patron est "Dieu" (oui je mets des guillemets ne faites pas vos N.A.Z.I de la religion on est dans un pays libre et laïc, en principe), ils ont l'air plus ou moins humains. Dans ce cas pourquoi nous présenter tantôt comme des super-flics au pouvoir d'influer sur la réalité et voir surhumains (avec l'eau comme kryptonite, allez savoir pourquoi), tantôt comme les humains. Bon pourquoi pas sauf que cela les rend moins dangereux, d'où je pense l'intervention du personnage de Richardson, qui est une personne plus paternaliste dans le sens impitoyable. Et même si en filigrane on apprend que le destin a été toujours que David et Elise soit ensemble et que David se débat bêtes et ongles pour qu'il le soit, ça ne marche pas beaucoup avec cette dichotomie. Et la fin même si elle est haletante est une vraie déception.
A la fin, après plusieurs péripéties sur plusieurs années, David décide de renouer une bonne fois pour toute avec Elise et lui révèle la vérité sur l'agence. Avec Mitchell, il parvient à déjouer les pièges et alors qu'il fait face à Tompson, Mitchell lui tend les directives du Grand Patron lui demandant d'arrêter sa traque. Et Mitchell se présente à eux en disant que c'était un test que tous les événements est un grande entorse au plan et qu'il l'a réécrit
Cette fin est l'une des fins les plus décevantes qui m'a été donné voir, même pour l'époque. Car cette fin détruit tout le message du film. Tout le film allait dans le sens qu'il fallait qu'ils luttent afin que leur amour triomphe et là tu nous fait une fin facile où tu te demandes pourquoi il n'avait pas fait ça avant le Grand Patron ? Pire encore, on ignore ce qu'il advient d'eux. On ignore si David est resté en politique ou si Elise est restée danseuse. C'est juste, ils vécurent heureux et eurent beaucoup d'enfant en gros. On ignore ce que leur relation va engendrer, car tout ce qu'on a est que leur relation n'était pas prévue dans le plan et que s'ils allaient poursuivre, cela aurait des conséquences désastreuses.
Ce qui m'amène à mon second point, à quoi tout cela a servit ? Pourquoi récupéré une nouvelle de Philipp K. Dick pour en faire un film si consensuel au final et perclus d'incohérences dans la narration ? Pourquoi n'avoir pas assumé le concept du film et d'en faire un vrai thriller en exploitant toutes les possibilités qu'offrait la nouvelle et en rendant les membres de l'Agence crédible ? Ce film pour moi est plus proche de la saga One More Day de Spider-Man que de Inception, une saga qui s'il est bien écrit abuse de facilités scénaristiques pour faire une fin consensuelle du tout est bien qui finit bien. On aurait pu avoir une même fin sans incohérences et en démontrant véritablement que leur plan était inapproprié. Et maintenant que j'y songe, pourquoi il n'y a que Elise qui n'a eu droit à une vie amoureuse et pas David ? Ouais !
Adaptation ratée ?
Bref ce film est très paradoxal. Il est bien réalisé et bien interprété, mais l'histoire manque de cohérences et possède un concept mal maîtrisé. Et là on ne peut pas dire que c'est à cause des producteurs et scénaristes vu que George Nofli était seul maître à bord. Il n'est pas désagréable à regarder et peut même être touchant, mais si vous voulez voir une bonne histoire sur le choix des destinées, allez voir Matrix Reloaded. Et préférez Total Recall version Schwarzy et Blade Runner comme meilleur adaptation d'une oeuvre de Philipp K.Dick. Moi j'attends toujours celui du K (tient on m'indique qu'on l'a déjà fait dans les suites des Dents de la mer...)