Après Capitaine Blood en 1935, Curtiz revient au monde de la piraterie avec Errol Flynn en cette période d'apogée du nazisme. Et hélas, de nazisme il est ici bien trop question. Autant dans Capitaine Blood les méchants avaient une personnalité et étaient placés en obstacles face à Errol Flynn, autant ici ils sont désincarnés. Les ennemis de Flynn sont tous les espagnols violents et avides rodant sur les mers. Si cet absence d'antagoniste bien campé (il y en a bien sûr, mais ils ne sont pas directement opposés à Flynn) aurait pu être intéressante, elle mène ici à une perte de force des enjeux. D'autant plus que le personnage de Flynn lui-même est moins campé que dans Capitaine Blood, où il profitait de l'aura de sa partenaire géniale Olivia de Haviland. Ici, le rôle féminin reste gentiment dans son rôle d'intérêt romantique sans génie, et c'est bien dommage, car le Capitaine en est affaibli.
Néanmoins, malgré la faiblesse relative du personnage principal, le scénario lui est génialement ciselé. On navigue de Londres à l'Espagne en passant par le canal de Panama sans s'ennuyer, le tout rythmé par des scènes d'actions plus grandioses que jamais. Un abordage massif avec une cinquantaine de figurants à l'écran notamment, qui transmet une certaine fureur guerrière, mais aussi des duels digne des plus grands films de cape et d'épée, où les ombres gigantesques des corsaires se livrent sur les murs un combat sans merci. On alterne scène romantique avec une scène d'action, scènes en mer avec scène sur Terre, une embuscade avec une évasion. Le film ne s'arrête jamais, et l'unicité des enjeux évite la cassure rythmique qui était le principal défaut du Capitaine Blood.
Enfin, il y a ce discours final de la Reine, (Flora Robson volant complètement la vedette à Brenda Marshall), tonitruante et vociférante, dans lequel Hollywood exhorte les américains à la guerre face au nazisme. Épique.
Un film avec un Errol Flynn un peu plus désincarné que le Capitaine Blood, mais au scénario diablement entrainant et efficace, et surtout doté d'une réalisation donnant de l'envergure aux combats.