Une fresque romantique saisissante, mais un peu trop étirée

Avec L'Amour ouf, Gilles Lellouche signe une fresque romanesque d'une rare intensité, un film où l’amour et le destin s’entremêlent sur plusieurs décennies. Il y a dans ce long-métrage une ambition cinématographique palpable, une envie de raconter une histoire d’amour démesurée, où les émotions sont exacerbées et les personnages marqués par une fatalité quasi-tragique.

L’une des grandes forces du film réside dans son duo principal : Adèle Exarchopoulos et François Civil livrent une prestation magistrale. Leur alchimie est indéniable, et chacun parvient à apporter une profondeur saisissante à son personnage. François Civil incarne avec justesse un jeune homme en quête d’identité, balloté par ses erreurs et ses désirs, tandis qu’Adèle Exarchopoulos brille par son naturel désarmant, capable d’émouvoir en une simple expression. Ces deux-là n’ont plus rien à prouver, et ils démontrent ici, une fois de plus, l’étendue de leur talent.

L’écriture du film est également l’un de ses points forts. Gilles Lellouche confirme qu’il est un cinéaste du sensible, sachant capter les tourments de l’âme humaine avec une justesse remarquable. Les dialogues sonnent justes, jamais forcés, et les personnages sont incarnés avec une authenticité rare. Lellouche parvient à insuffler à son film une énergie vibrante, où chaque moment semble guidé par une urgence émotionnelle. À travers une mise en scène soignée et immersive, il nous plonge au cœur de cette passion dévorante, où l’amour et la violence se croisent dans un tourbillon d’émotions.

Cependant, la longueur du film constitue son principal défaut. Avec ses 2h45, L’Amour ouf prend parfois son temps, peut-être trop. Certaines séquences, bien que visuellement impressionnantes, ont tendance à s’étirer, au risque de perdre le spectateur. La scène de la piste de danse en est un exemple frappant : si elle est censée illustrer un moment charnière, elle s’étire au point de briser un peu le rythme du récit. Ce genre d’étirement narratif peut desservir le film, en le rendant par moments trop contemplatif et en freinant son intensité dramatique.

Enfin, s'il y a une petite déception au casting, c’est du côté de Benoît Poelvoorde qu’elle se trouve. Habitué à livrer des performances marquantes, il semble ici un peu en retrait, ne parvenant pas à donner toute l’ampleur que son rôle méritait. Son personnage, qui aurait pu être un moteur dramatique plus fort, manque parfois de relief, ce qui est d’autant plus frustrant que l’acteur est capable de performances bien plus intenses.

Malgré ces réserves, L’Amour ouf reste une œuvre marquante et vibrante, portée par un duo d’acteurs exceptionnels et une écriture sensible. Gilles Lellouche y déploie un savoir-faire indéniable et confirme sa place parmi les réalisateurs français incontournables de ces dernières années. Un film qui saura toucher les cœurs, malgré quelques longueurs qui auraient mérité d’être mieux maîtrisées.