Lucy Kelson,avocate new-yorkaise écolo-gauchiste speedée,a pour but d'empêcher la destruction imminente d'un vieux bâtiment servant de centre culturel dans son quartier natal de Coney Island.Ne trouvant pour l'aider que le milliardaire du BTP George Wade,synthèse de tout ce qu'elle déteste,la voilà contrainte de travailler pour lui.Comme on peut le prévoir leur relation,très tendue au début,va progressivement virer à l'histoire d'amour.Il s'agit là du premier film du réalisateur et scénariste Marc Lawrence,et il y déploie déjà son aptitude à torcher une romcom légère et délicieusement drôlatique.Les dialogues principalement sont des modèles du genre,surtout ceux qu'il met dans la bouche de celui qui sera la vedette de quatre de ses cinq films,le distingué Hugh Grant,leur collaboration atteignant son zénith cinq ans plus tard avec le formidable "Le come-back".Solidement produit par Castle Rock,filiale de Warner,et Village Roadshow,le film file à bonne allure et multiplie les situations ambigües sous-tendues d'un humour bien calibré entre ses deux personnages ne voulant pas s'avouer à eux-mêmes les sentiments qu'ils éprouvent,par peur de faire une dramatique erreur en s'éprenant d'un être trop différent.Leurs caractères sont totalement opposés et le numéro de chien et chat qui nous est ici proposé est absolument savoureux,d'autant qu'il est porté par les Rolls de la comédie romantique,Sandra Bullock,également coproductrice du film, et Hugh Grant.Il ne se passe au final pas grand-chose mais le temps défile vite en compagnie de ces deux "amoureux sans le savoir" qui se chamaillent tout du long à fleurets mouchetés.Les fortes personnalités des protagonistes sont fouillées et oscillent entre charme dévastateur et mauvaise foi agaçante.Lucy est la plus responsable des deux,normal c'est la femme et elle est issue d'un milieu modeste,mais sa psychorigidité la bride émotionnellement et l'empêche d'accéder au bonheur.George est tout le contraire,affichant en toute circonstance une désinvolture et une impassibilité séduisantes mais énervantes à la longue.Sur le fond les problèmes immobiliers liés à une urbanisation galopante et incontrôlée sont évoqués sans fard,tandis que certaines scènes distillent une jolie émotion,le discours final de George en forme de déclaration qu'il "soumet" à l'avis de Lucy,ou vont loin dans l'humour trash,la confusion entre grossesse et obésité d'une postulante à un emploi ou la séquence de panique intestinale en voiture lors de laquelle Sandra Bullock n'hésite pas à casser son image glamour face à un Grant imperturbable.Le couple de comédiens survole le film et écrase quelque peu les autres acteurs qui sont peu mis en évidence.Hugh et Sandra sont clairement faits pour la romcom et se montrent à leur avantage dans cet exercice.L'actrice,belle et juste,déploie un registre étendu couvrant toute la gamme des expressions du genre,étant à la fois finement drôle et diaboliquement séduisante tout en sachant gérer les moments de sérieux ou d'émotion.Quant au britannique,il est le genre à lui tout seul et n'a guère d'égal en la matière.Sa démonstration de charme imparable associé au côté totalement déphasé du personnage fait merveille,d'autant qu'elle est augmentée de son truc personnel,l'auto-dérision hilarante.A propos d'auto-dérision,signalons l'apparition dans son propre rôle d'un Donald Trump qui,bien avant de devenir président,dégage une belle présence à l'écran.