The Beauty and the Beast.
Quel film! C'est le genre de truc qu'on voit une fois dans sa vie mais qui reste gravé au plus profond de notre mémoire. C'est un film tragique, très noir, très impudique.
Un professeur de sciences au mauvais caractère et un peu bougre, fait la connaissance d'une ravissante danseuse de cabaret "Lola", qui chante tous les soirs qu'elle "est faite pour aimer". Le professeur un peu bourru, est dès les premières secondes envoûté. Rapidement, il la demande en mariage, et sa descente aux enfers commence inéluctablement.
Il ne faut s'attendre à une romance ordinaire, comme j'ai pu le penser à la lecture du résumé, il s'agit bien là d'une tragédie, et arrivé à un moment du film, on est pris par un sentiment de dégoût qui donne envie d'arrêter net et de ne plus y retourner.
La déchéance du professeur, l'humiliation est telle qu'elle suscite un vrai haut le cœur. La performance des acteurs est extraordinaire. Le professeur basculant dans la folie, déshumanisé, réduit au stade de bête pour échouer sur son bureau auquel il se cramponne, dans une scène finale atrocement bien filmée, ou la danseuse, angélique, la "beauté du diable" qui a entraîné le professeur dans les plus obscures abîmes; les deux rôles sont assez bluffants. C'est un vrai rôle de composition pour chacun, lui s'enlaidissant, de jour en jour et elle, gardant cette fausse candeur du début à la fin. Alors que le temps passe et laisse des traces sur le vieil homme, elle ne semble pas vieillir et continue à chanter sa chanson qui prend des airs funestes, comme une douce mélodie de folie.
Le tout est bien filmé, il y a beaucoup de détails qui marquent. Les plans sont importants, alors qu'on ne voit presque jamais le visage de près de Lola, qui est comme un oiseau qu'on ne peut pas mettre en cage, les plans sur le professeur se multiplient, révélant un visage marqué par la souffrance, par le remords, le déshonneur. Puis une scène, insoutenable (non, je pèse mes mots), devant un public cruel pour cet homme seul, que personne ne semble comprendre. On sent la fin très proche.
D'ailleurs c'est ce qu'on souhaite à ce personnage rongé par la solitude, par l'incompréhension, comme une bête à l'agonie.
Un vrai grand film tragique, donc, qui n'épargne rien à l'œil avide et faussement pudique du public. Un véritable chef d'œuvre intemporel, qui n'a pas perdu de sa force au fil du temps. A voir ou revoir.