"T'as le troisième âge turbulent !"
...Constatation du commissaire divisionnaire Viroljeux, pas loin de la retraite, à Gabin, ici faux évêque, en cavale dans un Boeing 747 Alitalia détourné et qui rêve d'une fin de vie de retraité paisible lui-aussi. Entre autres, un des excellents dialogues de Jacques Vilfrid, un des habituels complices de Jean Girault (1924-1982), le réalisateur du film...
Peut-être pas aussi connu qu'Audiard, mais pourtant...
Lorsqu'on voit défiler le générique de ce film, on a l'impression de lire un faire-part mortuaire : je crains bien en effet que tous les acteurs de ce film soient décédés (A l'exception de Chantal Nobel, une des hôtesses de l'air, 73 ans en 2022 et qui eut ses moments de gloire au cinéma et à la télé)...*
A commencer par Jean Gabin lui-même dont ce sera le dernier tournage et qui joue un faux évêque à l'humour caustique.
Il devait lui-même rejoindre le paradis promis aux chrétiens, sept mois plus tard... Dans ce film, on le sent du reste, par moment fatigué, le visage un peu marqué par une leucémie dont il souffrait, et qui lui sera fatale. Mais épuisé aussi aussi par ses soucis, drames et déceptions de grand propriétaire terrien : de guerrelasse, écoeuré, il finit par vendre son domaine...
Les automatismes sont pourtant restés intact et cet espèce de flegme altier qu'il démontre vis à vis de son secrétaire-abbé est un grand moment ! Un prêtre lui dragueur malgré sa soutane et qui semble pourtant plus vrai que nature !.Il endosse sans difficultés ce costume taillé sur mesure, cabotin et flagorneur comme pas un...
Un film qui serait difficile à tourner de nos jours, les ecclésiastiques ne portant plus guère leurs habits sacerdotaux en public...
J'ai cru aussi reconnaître parmi les figurants un Jean-Loup Dabadie, pourtant non crédité au générique ?..
Ce n'est certes pas le film du siècle, mais dans un détournement d'avion, on sait qu'on ne s'ennuiera pas, surtout avec Girault : il a attiré 1 123 190 de spectateurs en salles. Le réalisateur fétiche de de Funès, est décédé lui, six ans après cette comédie policière, à l'âge de 58 ans, d'une tuberculose..
Un Gabin que je ne connais pas encore ou que j'avais oublié, je ne le laisse jamais passer : c'est presque toujours un enchantement...
Pari tenu : on ne s'ennuie pas dans cette grande évasion un peu ratée, une seule seconde, on sourit même souvent et on se demande comment ce détournement d'avion à la sauce humoristique Emile Galey , va finir ? Par la foudre qui va détruire les noirs desseins des malfrats : les voies du seigneur ne sont-elles pas impénétrables, même si aériennes !
Et puis, il y a le jeu succulent de beaucoup d'acteurs connus à l'époque dans ce casting à rallonges :
Ajoutons à ce satisfecit une excellente illustration musicale de Claude Bolling, peut-être un peu méconnu de nos jours, mais rendu célèbre jadis, avec le jazz...
Question vraisemblance, ce n'est évidemment pas la perfection : c'est ainsi que le Boeing censé appartenir à Alitalia affiche une immatriculation française (!)... Mais comme le pilote n'est pas un vrai pilote non plus (on eut aimé voir Didier Bezace), qu'importe le flacon pourvu qu'on ait l'ivresse !
France 3 le 20..03.2022-