Chronique d'une maison close parisienne cossue de 1900, "L'Apollonide" n'a pas réellement d'intrigue. Le film se centre sur les prostituées, et dévoile en détails leur quotidien : les relations plus ou moins amicales entre elles, les rapports aux clients souvent sophistiqués, leur devoir face à leur patronne, etc. Le tout avec un aspect très contemplatif, qui désarçonnera à coup sûr ceux qui n'adhèrent pas au cinéma visuel et/ou sensoriel.
Il serait toutefois dommage de décrocher, car outre la plongée presque documentaire dans cet univers, il s'agit là d'un très beau film. Les décors, les costumes, la photographie sont superbes, tandis que certains plans & effets de montages proposent des trouvailles visuelles. En conséquence, la souffrance de ces jeunes femmes, dépeinte de manière très sobre (il n'y a pas de scènes racoleuses, et l'érotisme reste très léger, voire inexistant), contraste avec ce visuel feutré.
Les actrices sont par ailleurs très belles et sensuelles, offrant une variété de profils. S'il on ne s'attache pas vraiment à elles (la faute à peu ou pas d'intrigue !), elles composent un tableau qui s'accorde avec le côté documentaire.
On notera aussi l'aspect presque nostalgique du film sur l'univers passé des maisons closes, d'autant plus marqué par la dernière séquence, filmée (volontairement ?) en qualité moyenne, qui tranche avec le reste. Mais il ne s'agit pas d'une nostalgie naïve, Bertrand Bonello étant clair sur le fait que ce qu'il dépeint reste une maison de luxe, et que la souffrance reste régulièrement présente.