Polar habité

Encore un bon vieux classique du cinéma français que je n'avais pas revu depuis une éternité et que je redécouvre avec plaisir. Sans être le plus grand ni le plus audacieux des films d'Henri-Georges Clouzot, surtout lorsqu'on connaît déjà l'identité de monsieur Durand, il y a vraiment de quoi être séduit par cette plongée dans le Paris des années 40, peuplé de personnages hauts en couleur, où chacun a un rôle à jouer, et où, sous des airs presque légers, se cache quelque chose de beaucoup plus sombre, inquiétant, sur la nature humaine. De l'humour, notamment à travers le personnage de Mila Malou, interprétée avec une gouaille sans équivalent par Suzy Delair, aussi drôle qu'épuisante, et le vrai reflet d'une époque, que ce soit l'état d'esprit, les lieux, l'ambiance qui pouvait y régner.

Dialogues souvent habiles, où il n'est nul besoin de grands discours pour exprimer avec intelligence et précision ce que cherche à exprimer Clouzot, notamment sur ses différents protagonistes. En moins de 90 minutes, le cinéaste en dit plus que certains en 120, voire 150. Cette économie est toujours justifiée, rendant d'autant plus marquants les « affrontements » du commissaire avec les suspects, jusqu'à la révélation finale, où chaque mot semble être savamment pesé pour comprendre les origines du Mal. Brillante interprétation, Pierre Fresnay y trouvant l'un de ses grands rôles, notamment face au « trio » Pierre Larquey - Noël Roquevert - Jean Tissier, longtemps insaisissable. C'était mieux avant ? En l'occurrence : oui.