Aaah, la vie... C'est pas tous les jours facile, hein ?

C'est ainsi que l'on pourrait résumer L'Astragale, nouveau film de Brigitte Sy, adaptation du roman autobiographique éponyme d'Albertine Sarrazin, jeune femme rebelle et anticonformiste, qui s'évade de prison en 1957 pour quasi-immédiatement tomber dans les bras de l'amour de sa vie, Julien Sarrazin.

Vous l'aurez compris avec ce titre plutôt sarcastique, ce film est très loin de m'avoir conquis. La faute à une mise en scène qui, probablement pour laisser de la place aux personnages et pour ne pas froisser les amateurs du livre, se contente de montrer, sans jamais chercher à faire jaillir le sens de l'image et non des dialogues ou des situations. Bien que possédant une image noir et blanc assez travaillée, le film ne brille pas non plus par son esthétique. Les plans sont très classiques et parfois même assez maladroits (en témoigne cette scène d'amour homosexuelle entre Albertine et son ancienne complice de délits, cadrée très maladroitement). Le film souffre également d'un problème de rythme et paraît souvent très lent, un temps qu'il n'utilise malheureusement pas pour étoffer ses personnages.

Car L'Astragale a pour principal défaut de ne pas développer tant que ça des personnages pourtant hauts en couleurs. Ainsi, Albertine ne se définit que par la relation qui la lie à Julien et la prostitution qu'elle exerce pour survivre (et encore, toutes les scènes supposément "trash" sont éludées, ce qui dédramatise totalement sa situation). A aucun moment le film ne s'intéresse à sa jeunesse, ni même aux raisons qui l'ont poussée à enfreindre la loi. Quand on sait qu'elle fut (et ce n'est qu'un détail de son histoire) violée par son oncle à l'âge de dix ans, on se demande pourquoi le film n'y fait pas une seule fois allusion. Quant à Julien, il traverse le film comme un fantôme et souffre d'un manque cruel de personnalité.

Mais le film fait aussi parler de lui pour son duo d'acteurs : Leïla Bekhti (César du Meilleur Espoir Féminin en 2011) et Reda Kateb (César du Meilleur Acteur Dans Un Second Rôle en 2013). Un tandem en or, donc ? Et bien, pas tant que ça. En effet, visiblement victimes d'une direction d'acteur aux abonnés absents, les deux têtes d'affiches livre une prestation en demi-teinte. Et si Leïla Bekhti s'en sort honorablement, Reda Kateb patauge dans la choucroute, à tel point qu'il semble parfois réciter son texte, sans aucune intention de jeu.

Le résultat est donc moyen, brouillon, parfois assez mal pensé, la faute à un nombre trop grand d'erreurs et d'approximations. De plus, le film semble passer un peu à côté de son sujet, car derrière cette figure de femme forte et indépendante se cache sûrement quelque chose de plus complexe, que la réalisatrice délaisse au profit d'une histoire d'amour tout à fait classique. Dommage.

P.S : cette critique est dédicacée avec affection à Clément Berthéol, qui saura parfaitement pourquoi.