Il fut un temps ou je ne regardais que des Hitchcock. Pas parce que j'aimais, mais parce que je voulais aimer tellement car les critiques hurlaient au génie. Je ne voulais pas passer pour un débile en société ou passer un côté de modèles du genre. Et donc je me suis abruti à voir 4 de l'espionnage, L'homme qui en savait trop (les 2 navets), Rebecca, etc. En tout plus d'une vingtaine. Même les meilleurs (Sueurs froides, Les oiseaux) étaient peu enthousiasmants. C'est seulement récemment que j'ai regardé Psychose. Je crois bien que pour moi il s'agisse du seul vrai bon film d'Hitchcock.
Donc, pourquoi je vous saoule avec mon autobiographie? Parce que je revis ce même masochisme avec Lucio Fulci. Après une impression plus que mitigée avec "La maison près du cimetière" (je me suis dit que seul le scénario était responsable), j'ai eu une triste expérience en regardant "Frayeurs". Le film qui semblait génial en voyant la BA, en écoutant la BO, et qui est en fait un accident industriel.
Et enfin j'ai vu un film érotique qui dégénère en thriller (Le miel du diable) et un thriller qui dégénère en film érotique (Perversion story), tous 2 de (très!) moyenne facture.
Après ces films, j'ai donné une nouvelle chance à Lucio en regardant L'Au-delà. (Enfin j'en parle!)
Le résultat est bof.
Dans les points forts, on peut parler de la musique de Fabio Frizzi, efficace et jolie à la fois, comme d'habitude. Et surtout il y a la sublime photographie de Sergio Salvatti, qui vaut à celle seule le détour. En voyant ce travail, je peux à la limite comprendre le culte que l'on puisse faire à ces films. Mais Fulci n'en est pas le responsable (d'ailleurs, quand Salvatti le quitta, le Roi du Gore deviendra le Roi des lumières qui provoquent le cancer des yeux). Le prologue tout en sépia est la partie la plus réussie de toutes.
Et puis, concernant le scénario, il faut reconnaître une chose. "Frayeurs" ne cessait d'hésiter entre le film de zombies et l'horreur lovecraftienne ruinant toute exploitation efficace (selon moi) de ces 2 genres. Au moins l'Au-delà contient une césure. C'est d'abord un film lovecraftien, avec une puissance horrifique puissante et cachée, et un livre mystérieux (ici le livre d'Eibon). Puis dans les 15 minutes, on décide de rajouter des zombis. C'est peut-être toujours indigeste, mais quand même moins que dans Frayeurs.
Mais bon, l'équipe Fulci - Sachetti ne peut arriver à faire un scénario correct. Au risque d'y passer des heures, je ne ferai qu'évoquer les héros ectoplasmiques, le manque de cohérence, les prétextes faciles à des scènes gore juste pour nous montrer du gore, et les nombreuses zones d'ombre.
Par exemple, qui est finalement cette aveugle (drôle d'hommage au pianiste de Suspiria)? A-t-elle pénétrée l'enfer comme nos héros à la fin, et a-t-elle pu en sortir? Pourquoi la fille du plombier est-elle "possédée", et dans quelle utilité? Pourquoi plein de zombis ne sont pas maquillés? Pourquoi notre héros persistera à tirer dans le bide des zombis (4 fois encore pour le dernier) alors que c'était simple à comprendre qu'il fallait viser la tête? Ah et le plus étrange, pourquoi branche-t-on un oscilloscope sur un cadavre décomposé?
Je viens de faire une sélection très courte (je pourrai en trouver 100 autres si je le voulais). Je trouve cela d'autant plus dingue que Démons est décrié à cause justement de son scénario soi-disant absurde (en fait pas tant que cela). Mais bon Bava Jr est moins un "auteur" que Fulci alors on va dire que c'est nul.
Et encore, il faut reconnaître à Fulci d'avoir écrit le prologue pour nous fournir quelques explications pour le reste de l'histoire. Et sinon, le "scénario" originel aurait dû conclure dans un parc d'attractions (!) Je me demande si l'équipe avait eu le budget, ce que cela nous aurait donné.
A ce propos, un autre film de Fulci, La malédiction de Pharaon, est décrié car étant trop confus. Je voudrais savoir si c'est vraiment le cas (par rapport à Frayeurs et L'Au-delà cela me semble inimaginable) ou juste car le réalisateur a dit lui-même qu'il ne l'aimait pas?
Un autre problème du film est le travail fait pour les effets spéciaux. Certains sont clairement ratés. L'exemple le plus célèbre étant la scène des araignées (un plan elles sont vraies, un plan on voit très bien que non) Fulci a expliqué que l'acteur avait refusé de se faire toucher par les araignées (il ne pouvait pas le virer et prendre quelqu'un de plus courageux, non?) Sinon, l'énucléation du plombier m'a bien fait rire, quand on voit très bien que la "peau" et les "sourcils" du plombier n'ont plus la même texture. Et évidemment il y a les zombis non maquillés. Le reste des trucages est correct, mais ce n'est quand même que du gore pour du gore, sans message (comme par exemple le fait Romero) et sans esthétique de l'acte en lui-même. C'est-à-dire que je pourrai aller à une boucherie, et voir des vaches se faire éviscérées, cela me ferait le même effet.
En clair, à réserver aux fans de Fulci (et ils sont un peu trop nombreux!) :)
PS : Vous pouvez me feinter en disant que j'ai aimé Inferno qui lui aussi a une structure peu conventionnelle, plus basée sur l'image et le son. Mais en fait non car Inferno ne part pas dans tous les sens; il s'agit plutôt d'une succession de "climax" et de meurtres dans la continuité de Suspiria (tueur de giallo et attaques animalières).